Synopsis : Le Paris des années 20. Marguerite Dumont est une femme fortunée passionnée de musique et d’opéra. Depuis des années, elle chante régulièrement devant son cercle d’habitués. Mais Marguerite chante tragiquement faux et personne ne lui a jamais dit la vérité. Son mari et ses proches l’ont toujours entretenue dans ses illusions. Tout se complique le jour où elle se met en tête de se produire devant un vrai public, à l’Opéra. Une histoire librement inspirée de la soprano américaine Florence Foster Jenkins, devenue célèbre grâce à son chant "très peu académique" dans les années 1920-1940.
Acteurs : Catherine Frot, Michel Fau, André Marcon.
Dès le début du film, nous sommes informés que le film se déroule dans les années 20 et qu’il est "d’après une histoire vraie". Le réalisateur s’était déjà essayé au genre en 2008, avec A l’origine où il adaptait en France une histoire franco-française. Ici, il s’agit d’une histoire américaine, celle de la richissime Florence Foster Jenkins qui se déroule aux USA. Si cette dernière se soucie peu des critiques (« Les gens pourront toujours dire que je ne sais pas chanter, mais personne ne pourra jamais dire que je n’ai pas chanté [1] ») et qu’elle chante devant un vrai public - restreint - à la fois amusé et conquis, il en est tout autrement de Marguerite, remarquablement interprétée par Catherine Frot ! Il s’agit en réalité d’une très très libre adaptation. A noter cependant que le thème du concert public de Marguerite s’appuie également sur un vrai et seul concert de son illustre modèle, à Carnegie Hall.
C’est agréable, séduisant, mais malheureusement trop long, même si le casting est impeccable. Outre Catherine Frot, André Marcon interprète son mari qui s’épuise à ne pas lui faire entendre (sic !) la réalité et la comble de cadeaux et de fleurs supposés offerts par ses nombreux admirateurs. Ensuite, Denis Mpunga joue le rôle du majordome, amoureux transi et platonique de sa maîtresse qu’il photographie sous toutes les coutures et dont il garde trace des nombreux tableaux que Marguerite veut (re)créer. Enfin, dans le rôle d’Atos Pezzini, le maître de chant et lui-même chanteur qui ne remplit plus les salles, Michel Fau fait ici une composition excellente. Il faut voir la décomposition de son visage lorsqu’il entend Marguerite chanter pour la première fois. Sa tête et son corps disent non et veulent fuir, mais quand le majordome le menace de dénoncer ses amours inopportunes avec des travestis et des homosexuels, il est bien forcé et contraint d’enseigner le chant à la diva qui ne pourra que mourir à sa gloire sur le champ d’honneur d’un concert public.
Hélas, le réalisateur ajoute deux personnages dans le scénario : des jeunes gens qui (se) jouent d’elles, par intérêt voire fascination (Lucien Beaumont), mais aussi parce que l’un d’eux (Kyril Von Priest) a des velléités anarchistes. Si les jeunes acteurs, respectivement Sylvain Dieuaide et Aubert Fenoy (qui viennent surtout de la TV et des courts métrages) jouent plus que correctement leur partition (!) leur présence au scénario ajoute des épisodes qui font perdre de l’épaisseur au coeur même du film : Marguerite la relation avec son époux et sa volonté d’autonomie par rapport à ce dernier. L’on aurait pu élaguer également certains éléments du personnage du maître de chant : ainsi on pouvait comprendre en quelques plans qu’il n’était pas ou plus au top de sa carrière. Inutile d’en rajouter avec la salle que l’on comble avec un faux public pour applaudir, etc. A noter aussi le jeune Diego (Théo Cholbi), troublant, amant de coeur ou d’argent, ou des deux, entremetteur, qui gère les questions financières entre le maître d’hôtel et son maître Pezzini.
Quelques informations inutiles ou pas...
- Il est plus difficile de chanter faux (quoique pour moi, je n’ai aucun effort à faire !) que juste... aussi Catherine Frot a suivi des cours de chant, mais elle a quand même dû être doublée par une "vraie" cantatrice pour ne pas perdre sa voix ! En revanche, l’actrice a adapté son jeu et sa gestuelle sur la base de vraies chanteuses lyrique.
- Si vous aimez la musique, notamment baroque, vous aurez droit à quelques parties chantées et là aussi probablement doublées !
- Les ailes de Marguerite ont une origine "réelle" à la base ! En effet, le réalisateur a découvert une photographie de la véritable chanteuse ainsi affublée.
- Stephen Frears a également le projet de réaliser un film sur Florence avec Hugh Grant et... Meryl Streep !
- C’est le premier film "historique" du réalisateur qui a été attentif à l’ambiance et aux vêtements d’époque et qui a même utilisé des optiques du milieu du siècle dernier, moins "perfectionnées" donc et à même de diffuser sensiblement la lumière et donner au film une texture singulière avec à certains moments des reflets inattendus tels que des éclats et des dissonances dans l’image, que le réalisateur souhaitait garder "vivante" (d’après Allociné).
- J’ai toutefois noté deux anachronismes ! Le disque utilisé pour entendre la voix enregistrée de Marguerite est un 33 tours... à l’époque c’était un 78 tours. Ensuite, on découvre une boîte de support photographique d’époque, de marque Kodak... Si la boîte est bien d’époque, le souci de réalisme aurait voulu qu’elle soit neuve et pas ancienne [2].
Bande-annonce de Marguerite :
L’air de la reine de la nuit de Mozart, par Florence Foster Jenkins
NB : bien qu’il s’agisse d’un fichier Youtube, celui-ci est uniquement sonore.