Genre : Thriller
Durée : 104’
Acteurs : Mia Goth, Elizabeth Debicki, Moses Sumney, Giancarlo Esposito, Lily Collins, Kevin Bacon, Michelle Monaghan, Bobby Cannavale...
Synopsis :
Los Angeles, dans les années 80. Star de films pour adultes et aspirante actrice, Maxine Minx décroche enfin le rôle de ses rêves. Mais alors qu’un mystérieux tueur traque les starlettes d’Hollywood, des indices sanglants menacent de dévoiler le sombre passé de Maxine.
La critique de Julien
Tandis qu’il s’ouvre sur une citation attribuée à Bette Davis selon laquelle "Dans cette industrie [celle du cinéma], tant que vous n’êtes pas considéré comme un monstre, vous n’êtes pas une star.", "MaXXXine" marque un terme à la trilogie du cinéaste Ti West débutée il y a maintenant deux ans avec le slasher "X", puis un an plus tard avec sa préquelle et thriller psychologique "Pearl", dont les événements se déroulaient chronologiquement avant ceux du premier cité, tous deux portés par l’actrice Mia Goth, qui y excellait. L’actrice, qui méritait incontestablement un Oscar pour son rôle de Pearl, revient donc une dernière fois (?) sous les traits de Maxine Minx, soit une jeune femme provocante et déterminée à devenir une star à Hollywood, après avoir survécu - au contraire de ses amis - à un massacre sur le lieu de tournage d’un film pour adultes. Dans un autre style, encore, Ti West clôture ainsi son œuvre avec un polar horrifique qui s’apparente à une satire acerbe et nostalgique de l’industrie glamour et sordide du cinéma hollywoodien des années 1980, tout en y pointant du doigt ses exigences, ses pressions, la difficulté de s’y frayer un chemin, d’y devenir une star, surtout lorsque l’on était une femme ; ce envers quoi s’est d’ailleurs toujours prononcée Bette Davis, citée donc dès l’introduction du film, et à qui "MaXXXine" rend ici un hommage prononcé, puisqu’on peut également entendre lors du générique de fin le tube "Bette Davis Eyes" (1981) de Kim Carnes. La question, dès lors, est de savoir si cette conclusion est à la hauteur des espérances ? Et nous avons notre petite idée sur la chose...
"Je n’accepterai jamais une vie que je ne mérite pas de vivre", tel qu’on peut voir en flash-back noir et blanc, et l’entendre dire une jeune Maxine devant la caméra de son père, lui faisant d’ailleurs répéter plusieurs fois cette phrase, mais avec davantage de conviction à chaque fois... Se déroulant en 1985, les événements de "MaXXXine" plantent, eux, leurs décors après ceux de "X", tandis qu’on y découvre une Cité des Anges en plein émoi, dans laquelle Maxine y arpente ses rues, ses vidéos clubs, mais surtout ses plateaux de tournage de films X et autres peep-shows afin d’y gagner sa vie, elle qui espère toujours y réaliser son rêve, que son antagoniste, Pearl, n’a - souvenez-vous - pas eu la chance de réaliser. D’ailleurs, tout le monde ignore ce qui s’est passé six ans auparavant pour Maxine, tandis qu’un tueur en série et délinquant sexuel (le Night Stalker) fait actuellement régner la psychose à Los Angeles, s’attaquant précisément à des starlettes ; des corps démembrés étant découverts, portant la marque d’un symbole satanique. Mais Maxine, avec sa volonté impitoyable, passera sans hésiter, et avec succès, le casting pour un film d’horreur...
On l’a déjà dit, mais "MaXXXine" se regarde d’emblée comme si nous étions projetés, par capsule temporelle, en 1985, lequel est donc référencé jusqu’à plus soif, et emprunte même sans vergogne au cinéma du cinéma giallo de Dario Argento, tandis qu’on y croise aussi, pêle-mêle, des clins d’œil aux films "Vice Squad : Descente aux Enfers" (Gary Sherman, 1982), "L’Ange de la Vengeance" (Abel Ferrara, 1981), "Harcdore" (Paul Schrader, 1979), Chinatown (Roman Polanski, 1974), ou encore à "Psychose" (1960) d’Alfred Hitchcock. Avec sa reconstitution d’époque soignée, mais aussi la photographie graineuse d’Eliot Rockett, son ambiance et sa bande originale très 80’s (d’Animotion à ZZ Top, en passant par Frankie Goes to Hollywood et New Order ou Laura Branigan) et globalement sa réalisation très esthétique, "MaXXXine" ne se regarde pas comme un film d’époque, mais se vit comme un film d’époque, à la fois suranné, saturé et flamboyant. On y traverse littéralement les studios de cinéma, et on y sent l’attrait pour les VHS, ce qui n’est pas pour nous déplaire. C’est d’ailleurs bien plus pour l’emballage que ce film se détache de ses aînés, et sans doute beaucoup moins pour la qualité de son écriture, laquelle emprunte une tournure plus conventionnelle, autour d’une chasse à l’homme ayant finalement bien plus de liens avec son héroïne qu’elle ne le pense, laquelle va devoir, après avoir déjà été poussée à bout, contre-attaquer une nouvelle fois. Alors que ce sous-texte ne s’avère pas des plus excitants à l’image, la chute, elle, ne convainc guère non plus, sans être dès lors attendue, et face à laquelle ne semble pas croire Maxine elle-même. Qu’importe, la manière dont Ti West et sa protagoniste grattent ici le vernis des coulisses du show-business du septième art hollywoodien des années 80 vise juste, tandis qu’il y est aussi question de l’hypocrisie du fanatisme religieux et autres puritains et de la manière dont ils accusent l’industrie (de l’horreur et du porno) de pervertir la jeunesse. Quelle ironie du sort !
Mais que serait également ce film sans Mia Goth, ici de tous les plans, elle qui est une nouvelle fois de plus subjuguante dans sa partition, mais ici de beauté, de ténacité, d’ambition, et cela face à une impressionnante galerie d’acteurs de haut vol, puisque le casting peut compter sur la présence d’Elizabeth Debicki, de Lily Collins, de Michelle Monaghan ou encore de Kevin Bacon, lequel sort d’ailleurs du lot dans la peau d’un détective privé aux méthodes peu orthodoxes, sans oublier Giancarlo Esposito, qui réinvente ici le rôle d’un agent (et c’est très drôle). Mais dans l’ensemble, leurs personnages n’ont que bien peu d’occasions ici de briller, et ne font finalement que de la figuration, dès lors sacrifiés pour laisser toute la place à la star du film, Mia "Maxine " Goth, qui en est vraiment une, et qui n’a plus à le prouver. En espérant maintenant que cela soit enfin reconnu - à juste titre - par Hollywood et son Académie ! Ti West, lui, s’en sort avec une trilogie de films qui ne ressemble à aucune autre, entre horreur, fascination, paranoïa et passion pour le cinéma d’antan. Réalisée en un temps record, et sans en délaisser la qualité de son point de vue, nous avons affaire là à une œuvre entière profondément cinématographique, et à côté de laquelle il serait dommage de passer. Question de cinéma de genre, c’est cependant bien "MaXXXine" qui devrait engendrer le moins de louanges de la part du public lambda, ou des fans des deux premiers épisodes...