Genre : Comédie dramatique
Durée : 164’
Acteurs : Emma Stone, Jesse Plemons, Willem Dafoe, Hong Chau, Margaret Qualley, Joe Alwyn, Mamoudou Athie, Hunter Schafer...
Synopsis :
Une fable en tryptique qui suit : un homme sans choix qui tente de prendre le contrôle de sa propre vie ; un policier inquiet parce que sa femme disparue en mer est de retour et qu’elle semble une personne différente ; et une femme déterminée à trouver une personne bien précise dotée d’un pouvoir spécial, destinée à devenir un chef spirituel prodigieux.
La critique de Julien
Présenté au Festival de Cannes en Sélection officielle en compétition où Jesse Plemons a remporté - par surprise - le prix d’interprétation masculine, "Kinds of Kindness" est la seconde réalisation du grec Yórgos Lánthimos à sortir cette année-ci au cinéma, après "Poor Things". Or, ce dernier film a quant à lui offert à Emma Stone son deuxième Oscar de la meilleure actrice, Lánthimos la retrouvant d’ailleurs ici à l’affiche de ce film, ou plutôt de ce triptyque, aux côtés de Willem Dafoe, Hong Chau, Margaret Qualley ou encore Mamoudou Athie. Trois histoires, donc, pour une seule comédie noire et psychologique, dans laquelle ces acteurs jouent successivement des personnages différents, excepté pour Yorgos Stefanakos, interprétant R.M.F., quant à lui au centre de chacun des courts-métrages, intitulés respectivement "The Death of R.M.F.", "R.M.F. is Flying" et "R.M.F. Eats a Sandwich", mais sans pour autant qu’il y ait de connexion (directe) entre son même personnage et les différents segments narratifs du film. Coécrit avec son fidèle collaborateur Efthymis Filippou, lesquels ont notamment travaillé sur ses films "Dogtooth" (2009) et "Alps" (2011), ainsi que sur ses premiers métrages en langue anglaise que sont "The Lobster" (2015) et "The Killing of a Sacred Deer" (2017), "Kinds of Kindness" est une étrange proposition de cinéma, ce qui n’est en rien étonnant de la part du cinéaste grec. Fable caustique désarçonnante où il y est question de bonté humaine malsaine, de rapports sociaux maladroits et de suspicion surréalisme, son film est surtout un pétard mouillé prétentieux dont les intentions sont bien floues, et dont l’existence se discute au sein de sa filmographie, jusque-là ascendante...
Étant donné sa mise en scène assumée, "Kinds of Kindness" nécessite la bonne volonté du spectateur de se laisser porter par ces histoires modernes et dérangeantes, sans qu’elles ne mènent, en plus, nulle part. Or, Yórgos Lánthimos prend le temps de mettre en place ses personnages et les relations d’emprise et de domination, d’obsession et de paranoïa, ou encore sectaires qui les lient, jusqu’à leur chute, qu’on attend alors avec impatience, mais qu’on a pourtant bien le temps d’attendre, tant l’ensemble manque cruellement de rythme, au contraire d’absurdité et de cruauté. En effet, le titre "Kinds of Kindness" est sans aucun doute un antonyme de ce qu’aurait être le véritable titre de ce film, lequel pousse ses personnages à commettre l’irréparable pour autrui, même si cela est insensé, et donc forcément irréversible. Méchant, son film l’est donc au plus haut point, mais toujours dans un souci d’abnégation de la personne, et par amour. Mais le souci, c’est qu’on ne parvient pas à entrer en empathie avec ces personnages, qu’ils soient pervers, perchés, autoritaires, erratiques, déterminés, ou encore contaminés. On reste alors extérieur à toute cette farce provocatrice, froide et obnubilée, et à ses détails faussement intéressants, qui nous éparpillent dès lors, malgré ses décors, ses cadrages symétriques et sa photographie soignés, et situés à l’opposé des fioritures de ses derniers métrages.
S’ouvrant sur le titre "Sweet Dreams" d’Eurythmics, "Kinds of Kindness" n’a donc rien de doux rêves, mais plutôt de cauchemars éveillés, et pourtant ronflants. N’en déplaise, si l’expérience à laquelle nous confronte le cinéaste du bizarre est assommante et impertinente, son film demeure une autopsie de la condition humaine comme peu de cinéastes l’osent, tout en étant parfaitement entouré dans sa démarche, quitte à se poser des questions... Mais celle-ci reste vaine, volontairement grinçante, toujours dans l’abus, et malheureusement sans ampleur. Si une chose est donc certaine, c’est que ce film ne vous laissera pas indifférent, pour autant que vous arriviez au bout !