Genre : Comédie dramatique, film familial
Durée : 104’
Acteurs : Ryan Reynolds, John Krasinski, Cailey Fleming, Fiona Shaw, Bobby Moynihan, Alan Kim...
Synopsis :
Une petite fille, Bea, découvre un jour qu’elle peut voir les amis imaginaires de tout le monde. Commence alors une aventure magique pour reconnecter chaque enfant à son ami imaginaire oublié.
La critique de Julien
Quand il n’est pas occupé avec ses films "Sans un Bruit" (2018) et sa suite "Sans un Bruit 2" (2021) à mettre en scène un monde post-apocalyptique peuplé de créatures extraterrestres très sensibles aux sons et dans lequel les humains doivent donc survivre sans faire le moindre bruit, John Krasinski se lance sur le terrain du film familial, situé ainsi à l’opposé de ses thrillers qualitatifs et quantitatifs sous tension absolue. Et tandis qu’il avait coécrit le premier du nom et écrit seul le scénario du second, le cinéaste, producteur et acteur (on l’a notamment vu dans plusieurs saisons de la série "The Office", ou encore "Jack Ryan"), ce dernier a également imaginé ici (et c’est peu de le dire) l’histoire de cette douce et irrésistible comédie qu’on a eu la chance de découvrir - avec la France - les premiers dans le monde. Et autant dire que celui qui est aussi père de famille - et marié à l’actrice Emily Blunt - sait aussi bien y faire avec les monstres que les films pour enfants, bien qu’il serait dommage réduire "Blue & Compagnie" à cette seule étiquette. Car il est bien plus que cela, et nous invite à croire à bien plus. Et c’est une merveilleuse surprise !
On y suit alors l’histoire d’une jeune fille, Bea (Cailey Fleming), elle qui doit, après avoir perdu sa maman des suites d’une maladie, retourner vivre chez sa grand-mère à Brooklyn, le temps que son père (John Krasinski lui-même), qui est grand enfant au cœur aussi grand, se fasse justement opérer du sien. Alors qu’elle s’est forgé une carapace émotionnelle suite à la douleur de la perte, et ne se considère plus comme une enfant, la demoiselle, qui résiste ainsi aux blagues incessantes de son papa, redoute en réalité son opération. Mais après avoir entendu du remue-ménage chez les locataires - pas comme les autres - du dernier palier de l’immeuble elle découvrira sa capacité à voir les amis imaginaires de tout en chacun. Du moins, c’est ce qu’elle comprendra lorsqu’elle fera la connaissance de Cal (Ryan Reynolds), qui réside dans l’appartement en question, lequel semble également posséder ce don quelque peu unique, et fantastique. Car les amis imaginaires, surnommés ici les "AI" (le titre anglophone "IF" est l’abréviation du titre "Imaginary Friend"), existent bel et bien ! Sauf que ces derniers sont oubliés par leurs enfants, en devenant adultes. Dans sa mission de reconnecter ces personnages à leurs anciens partenaires de réconfort et d’histoire, Cal se verra alors aidé par Béa, lesquels uniront ainsi leurs forces et peurs...
On ne va pas se mentir, et vous dire qu’on a été ému aux larmichettes par "Blue et Compagnie", lequel, s’il se vit hauteur de la vie d’une petite fille ayant grandi trop vite, traite de thèmes aussi profonds qu’universels, et qui toucheront dès lors aussi bien les petits que les grands (la preuve en est !). Si la pierre angulaire de son film est le deuil ("ne plus savoir dire au revoir"), John Krasinski prend alors nos sentiments par la main pour nous rappeler le droit de ne jamais arrêter de rêver, et cela peu importe notre âge, et donc de garder, au fond de nous, une part enfantine intacte, à ne pas rogner, pour, à notre tour, la partager, alors qu’il y est aussi question du temps qui passe. Mélancolique et tendre, le film s’avère pour cela très bien aidé par son univers visuel coloré, très imaginatif, et rempli de sympathiques et attendrissants personnages animés (qui en rappellent d’autres), réalisés par le studio britannique Framestore, mais également par la splendide photographie de Janusz Kamiski, lequel n’est autre que le chef-opérateur fétiche de Steven Spielberg. C’est dans un pur conte - de surcroît réaliste - de cinéma que le spectateur plonge ici, lequel parviendra sans mal à le (re)connecter à sa propre existence. Cependant, dans l’univers qu’il met en scène, John Krasinski use de quelques facilités d’écriture qui laissent sur notre faim, tandis que demeure ici une part de mystère quant à l’existence de ces amis imaginaires, vis-à-vis notamment de l’endroit où ceux qui sont oubliés se reposent. Tandis que de nombreuses réponses manquent à l’appel, on reste alors quelque peu sur notre faim quant au monde fantastique prenant vie devant les yeux, lequel est, selon nous, pas assez exploité, alors qu’on pourrait enfin lui reprocher un manque global d’humour, de folie. Mais là n’est pas le cœur du film...
Sublimé par la féérique bande-originale (peut-être trop envahissante ?) composée par l’oscarisé Michel Giacchino, "Blue & Compagnie" est une parenthèse de cinéma qui réchauffe alors le cœur, et qui laisse entrevoir la lumière, portée alors par le visage espiègle et le sourire en coin de la jeune Cailey Fleming, tandis que Ryan Reynolds, avec ses accoutrements de clown, n’en fait jamais des caisses. Quant à John Krasinski, on le sent terriblement reconnaissant au travers de son film par l’amour que lui portent ses deux filles, lesquelles ont considérablement inspiré ce métrage. Sa démarche, claire comme de l’eau de roche, et sans grande prétention, s’avère pourtant encore plus riche qu’il n’aurait pu l’espérer ! On ressort alors particulièrement bouleversé par cette ode au pouvoir des histoires et à l’imagination, lesquelles nous aident bien plus qu’on ne pourrait le penser, et cela à tout âge. Il se dégage définitivement beaucoup de magie de ce film, lequel parvient cependant à toujours garder les pieds sur terre, pour mieux nous parler... Bref, il serait dommage de vous priver, vous et vos enfants, et leurs grands-parents, de cette petite pépite. Vous voilà prévenus...