Genre : Drame, romance
Durée : 131’
Acteurs : Zendaya, Mike Faist, Josh O’Connor...
Synopsis :
Tashi Duncan, une ancienne prodige du tennis devenue entraîneuse et une force de la nature ne s’embarrasse pas d’excuses pour son jeu sur le court et en dehors. Mariée à un champion en perte de vitesse, la stratégie de Tashi pour la rédemption de son mari prend une tournure surprenante lorsqu’il doit affronter Patrick, son ancien meilleur ami et l’ancien petit ami de Tashi. Alors que leur passé et leur présent s’entrechoquent et que les tensions sont à leur comble, Tashi doit se demander ce qu’il lui en coûtera de gagner.
La critique de Julien
Jeu, set et match ! Initialement censé faire l’ouverture de la Mostra de Venise 2023, avant d’être déprogrammé en raison de la grève de la Writers Guild of America de 2023, "Challengers" de Luca Guadagnino débarque enfin dans nos salles, et cela tel un ace ! Le dernier né du réalisateur italien, à qui l’on dit notamment "Call Me By Your Name" (2018) et - le dernier en date - "Bones and All" (2022), est un triangle amoureux vénéneux et sensuel, dans lequel la sublime et talentueuse Zendaya mène le match, mais pas comme on l’entend. Le film nous emmène alors en 2019 lors d’un match de l’ATP Challenger Tour de New Rochelle, à New York, alors que deux joueurs masculins s’affrontent devant le regard de l’ex-championne Tashi Duncan (Zendaya), ayant dû quitter la compétition à la suite d’une vilaine blessure au genou. Le premier, Art Donaldson (Mike Faist), est alors un riche joueur de tennis professionnel, mais en perte de vitesse, lequel, dans l’espoir de renforcer sa confiance en lui-même, participe, avec une wild car, à des matchs joués avec des adversaires inférieurs. Le second, Patrick Zweig (Josh O’Connor), est quant à lui un ancien champion désormais l’oser, et 271e du circuit ATP, lui qui vit grâce aux gains des circuits inférieurs. Mais outre le match qui les unit, Art et Patrick sont en réalité deux anciens colloques et meilleurs amis, lesquels, treize ans plus tôt, ont tenté de draguer le même espoir du tennis féminin, Tashi Duncan, à la faveur, semble-t-il, d’Art, lequel est le mari de cette dernière, elle qui est aussi la mère de sa fille, et son entraîneuse. Sauf que Patrick n’a jamais été bien loin, malgré les rancœurs. C’est donc bien plus qu’un match sous tension qui se joue sur ce court de tennis...
Raconté essentiellement sous la forme de flash-back, nous permettant ainsi de mieux comprendre la teneur de la relation qui lie ses trois personnages principaux et les enjeux personnels de la rencontre qui se joue devant nos yeux, "Challengers" n’est pas un film qui révolutionnera le cinéma, dans le sens où son intérêt principal réside dans l’attraction tempétueuse qui anime ces derniers, et la manière dont le cinéaste italien filme les courts de tennis. Et autant dire que c’est un grand huit ! Pourtant, celle qui tire ici les ficelles est le personnage de Zendaya, voyant son protagoniste vouloir gagner à tout prix ce qu’il n’a pu gagner lui-même, quitte à manipuler les deux hommes en question, tombés dans sa toile, dans son collimateur (le choix de l’affiche officielle ne trompe pas). Écrite par le dramaturge Justin Kuritzkes, cette histoire se suit alors comme un puzzle que le spectateur reconstitue au fur et à mesure des va-et-vient entre passé et présent, à l’heure où se dispute le match, ce qui nous permet de porter un regard différent, à chaque révélation, sur ses joueurs, mais surtout sur celui qui est assis en tribune...
La mise en scène du film, destructurée (il faut parfois s’accrocher), offre donc de l’efficacité au métrage, assez bavard, tandis que les maquillages eux, permettent aussi de croire en ces treize années qui séparent la première rencontre en ces trois mousquetaires du tennis jusqu’au jour j. Le travail de la chef maquilleuse Kellie Robinson fait alors des merveilles, surtout avec Zendaya, passant sans cesse de son adolescence à une jeune femme d’une petite trentaine d’années ; son personnage gagnant d’ailleurs en ascendance sur Patrick et Art au fil du temps, et du tournant qu’a pris sa carrière.
Au travers de ce film très cinégénique, et souvent tape-à-l’œil, on y voit également des terrains de tennis filmés comme jamais encore, avec des plans à hauteur de poignée de main (la balle passant très près de celle-ci), tandis que ceux du climax du film, lors d’un tie-break phénoménal, se vivent à la place de la balle. On se retrouve dès lors autant baladé d’une raquette à l’autre que le sont ici les acteurs Mike Faist et Josh O’Connor, en challengeurs, lesquels entretiennent une relation et ménage pour le moins ambigu. La musique de Trent Raznor et d’Atticus Ross fait également le job, avec ses sonorités très rave-party et house music, qui donnent le ton au film, et son énergie, et cela même lorsque ses protagonistes ne font qu’échanger oralement. D’ailleurs, celle-ci se veut même un brin trop envahissante par moments, où non justifiée.
À ne pas s’y méprendre, les fans de tennis devraient cependant être déçus par ce film, lequel n’est finalement pas un film sportif, lui qui ne nous en apprend que très peu sur le sport qui sert ici de toile de fond audit triangle amoureux sponsorisé, bien que la scène finale étonne par sa force de frappe implacable, elle qui crée la surprise, et referme d’une manière inattendue ledit match, en rabattant ainsi les cartes. Mais d’une manière générale, "Challengers" n’est jamais très explicite dans ses messages, dans lesquels il essentiellement question de compétition au sens large du terme, de jeu de pouvoir et de désir, de frustration professionnelle, ou encore de revers de carrière, sans malheureusement creuser ces sujets. Un film qui s’avère dès lors bien plus superficiel que consistant. N’en déplaise, "Challengers" remporte la balle de match, ou en tout cas celle du film le plus sexy et transpirant - jusqu’à présent - de l’année. Merci Zendaya !