Genre : Drame
Durée : 91’
Acteurs : François Damiens, Salomé Dewaels, Roman Kolinka, Anne Coesens, Jean-Michel Balthazar...
Synopsis :
Quand Alain doit jouer Brel, son destin se mélange à celui de l’artiste. Cette rencontre va le rapprocher de sa fille et bouleverser sa vie.
La critique de Julien
Si on nous avait dit un jour que François Damiens serait grimé en Jacques Brel, alors on ne l’aurait pas cru. Et pourtant... "Sous le Vent des Marquises", c’est la nouvelle comédie dramatique de Pierre Godeau, dans laquelle l’acteur belge campe Alain, un grand comédien interprétant pour son nouveau film le rôle de Jacques Brel. Mais se sachant malade, celui-ci va brusquement abandonner le tournage du film pour retrouver sa famille, et précisément sa fille Lou, qu’il a quelque peu abandonnée au fil des années pour sa carrière...
La filiation semble être un thème récurrent dans la filmographie du cinéaste. Et sa nouvelle réalisation est sans doute sa plus personnelle, lequel est lui-même fils d’un cinéaste et producteur (Philippe Godeau), avec lequel il a toujours entretenu une relation pudique, lesquels se sont alors rapprochés par leurs amours respectifs du cinéma. Dans ce film, il est donc question de dialogue renoué entre une jeune demoiselle aspirant à devenir comédienne et son père, en obtenant, de plus, son estime pour se lancer dans le milieu qui les a éloignés, et finalement rapprochés.
Tourné hors saison sur l’Île-aux-Moines, "Sous le Vent des Marquises" est d’après son réalisateur une "déclaration d’amour au cinéma, à la fiction, aux histoires qui constituent de formidables biais pour nous rapprocher". Le metteur en scène nous invite alors dans son imaginaire, notamment en noir et blanc lors du tournage des images du film sur Brel, ou encore sur un bateau, où père et fille se retrouvent, comme dans un film-souvenirs, et discutent autour du scénario que le premier doit jouer, et que sa fille va pousser à ne pas abandonner, malgré la maladie qui le ronge. Quant à l’idée de faire jouer Brel à son personnage principal, celle-ci lui a surgie par hasard, après avoir vu un tableau d’un peintre belge contemporain Harold Ancart, intitulé Les Marquises (2012), représentant une sorte d’archipel noir et blanc, ce qui a donné à Pierre Godeau l’envie de lever "un voile sur les dernières années de la vie de Jacques Brel", "frappé par les liens qui se tissaient presque naturellement entre son histoire" et celle qu’il écrivait. Sauf que l’évocation est un brin tirée par les cheveux pour ici se justifier, tout en étant, certes, un clin d’œil au voyage entrepris par Brel en voilier dans l’Océan Pacifique, en 1974, accompagné de sa deuxième fille France et de sa compagne de l’époque, Maddly Bamy, avant de se retirer dans les îles Marquises. Quant à notre compatriote François Damiens, celui-ci ne ressemble aucunement à l’artiste disparu. Le point commun entre ces derniers réside alors dans leur célébrité qui les a éloignée des leurs (dont de leurs filles), lesquelles ont dû apprendre à partager leur père avec des étrangers, mais aussi dans leurs fragilités, faiblesses et tourments, dont la maladie...
"Sous le Vent des Marquises" n’a malheureusement rien d’un grand film, lequel se termine d’ailleurs sans arriver au bout du chemin qu’il avait entrepris, de la Normandie jusqu’à Bruxelles. Le spectateur sera d’ailleurs surpris de la manière dont se termine cette histoire inachevée, et quelque peu forcée, au regard du jeu de Salomé Dewaels, qui, par exemple, pousse en pleurs le personnage de son père à lui dire quelque chose, lui "devant bien ça", elle qui éprouve de la fierté pour celui-ci, tout en espérant en trouver en lui à son égard. François Damiens, lui, est sincère et touchant, mais peine à voir étant donné sa perte de poids assez spectaculaire pour son rôle. Sans doute cette transformation n’en valait pas la peine. Quoi qu’il en soit, le film n’aurait pas la même mélancolie et profondeur sans son jeu. Mais outre la relation entre ses deux personnages principaux, on aurait aimé que Pierre Godeau développe également celle qui lie l’acteur à son ex-épouse, et cela d’autant plus quand on sait qu’elle est jouée par la sublime et toujours juste Anne Coesens. Finalement, Pierre Godeau, co-produit par son père, réalise là un drame trop linéaire, redondant et attendu, qu’on aura vite fait d’oublier...