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CINECURE
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Cinécure est un site appartenant à Charles Declercq et est consacré à ses critiques cinéma, interviews sur la radio RCF Bruxelles (celle-ci n’est aucunement responsable du site ou de ses contenus et aucun lien contractuel ne les relie). Depuis l’automne 2017, Julien apporte sa collaboration au site qui publie ses critiques et en devient le principal rédacteur depuis 2022.

Ben Wheatley
En Eaux (Très) Troubles (The Meg 2 : The Trench)
Sortie du film le 02 août 2023
Article mis en ligne le 11 août 2023

par Julien Brnl

Genre : Action

Durée : 116’

Acteurs : Jason Statham, Jing Wu, Cliff Curtis, Sienna Guillory, Skyler Samuels, Sergio Peris-Mencheta...

Synopsis :
Une équipe de chercheurs part explorer les profondeurs de l’océan. Leur périple tourne à la catastrophe lorsqu’une opération d’extraction minière illégale met en péril leur mission – et leur vie. Confrontés à d’immenses megalodons et à des bandits sans pitié, nos héros doivent échapper aux terribles prédateurs en gardant toujours un temps d’avance sur eux dans une terrifiante course contre la montre.

La critique de Julien

"On prend les problèmes l’un après l’autre. On s’occupe du premier, et on passe au suivant", comme le répétera plusieurs fois ici Jonas, le personnage de Jason Statham, à celui de sa belle-fille (Shuya Sophia), dans la suite de leurs aventures, se déroulant cinq ans après les premiers événements de "En Eaux Troubles". Sauf qu’il n’y a que des problèmes (!) dans "En Eaux (Très) Troubles", réalisé non plus par Jon Turteltaub, mais bien par Ben Wheatley (pauvre de lui), d’après le roman d’horreur et de science-fiction "Meg : The Trench" (1999) de Steve Alten, lui-même étant la suite du roman "Meg : A Novel of Deep Terror" (1997), duquel le premier épisode était adapté. En plus d’incohérences plus grosses que les mégalodons en question, il y a même erreur ici sur la marchandise ! En effet, le spectateur venu pour voir des requins géants gober des touristes insouciants n’en aura pas pour son argent, et devra d’abord se farcir une longue et improbable mission sauvetage/d’extraction totalement décousue, depuis les fins fonds de la fosse des Mariannes, avant de regagner (enfin) le large et Fun Island, une île chinoise où, comme son nom l’indique, tout le monde fait la fête. Car c’est bien connu, en Chine, pays communiste, on s’amuse (très) bien, en sirotant des cocktails sur la plage, en maillots...

Après une introduction anachronique qui risque de faire mal aux yeux et surtout aux archéologues, on retrouve ainsi Jason Taylor, lui qui, en plus de lutter vaillamment contre les crimes environnementaux (tout en polluant lui-même), explorent toujours, avec ses amis chinois le monde sous-marin depuis leur base d’opérations Mana One, lesquels savent désormais que d’autres megs vivent dans les profondeurs océaniques de la fosse des Mariannes, sous une barrière thermocline [1], eux qui espèrent d’ailleurs découvrir d’autres créatures, dont dans des zones encore non cartographiées. Et ça tombe bien, puisqu’une richissime entrepreneuse milliardaire (Sienna Guillory) finance leurs recherches, menées dès lors par Jonas Taylor et Jiuming (l’acteur, réalisateur et méga star chinoise Wu Jing), lequel a acquis la société de son père et joue le rôle du frère de la - semble-t-il défunte - Suyin Zhang (Li Bingbing n’a pas rempilé pour son rôle), elle qui était la compagne de Jonas. La fille de cette dernière, Meiying (Shuya Sophia Cai, désormais adolescente), vit donc avec son beau-père et son oncle, jouant ainsi aux pères de substitution. Mais alors que Jiuming tente d’apprivoiser un mégalodon gardé en captivité dans une réserve à Hainan, l’équipe s’adonnera à une nouvelle descente, elle qui tombera sur une opération minière illégale, menée depuis une station utilisant des moyens faramineux pour extraite des minéraux, tandis qu’ils se retrouveront pris au piège d’un éboulement à la suite d’explosions, provoquant une brèche dans la thermocline, de quoi laisser s’échapper, avant eux, plusieurs mégalodons (très, voire tout le temps) affamés, des lézards amphibies préhistoriques, et une pieuvre géante...

Après le premier film, qui n’était pas le nanar qu’on attendait, bien que trop sage, et pour lequel on devait déjà laisser notre cerveau au placard, sa suite, elle, est bien un nanar, et qu’on n’attendait pas ! Alors que le sous-marin Titan implosait le 18 juin dernier pendant qu’il était en train d’explorer l’épave du mythique Titanic, et cela par près de 4000 mètres de fond, le personnage de Jason Statham, lui, arrive ici à nager sans combinaison (quand bien même avec une combinaison exosquelette) à plus de 7600 de fonds. Car oui, on apprend ici que "l’eau ne se comprime pas avec la pression". Dès lors, si l’on parvient ainsi à "remplir ses sinus d’eau", on peut "survivre 30 à 60 secondes avant de perdre connaissance" ! Sérieusement ? Les trois scénaristes du film (Jon Hoeber, Erich Hoeber et Doyen Georgaris, pour ne pas les citer) prennent-ils autant les spectateurs pour des imbéciles ? Car l’écriture du film par dans tous les sens, sans queue/aileron ni tête, et fait sans cesse l’inverse de ce qu’elle vient d’affirmer, se contredisant à répétition. Bien qu’il se veut hypocritement défenseur de la science et du respect de la nature, "En Eaux (Très) Troubles" réécrit alors, à sa manière, et sans discernement, les lois de celle-ci. Aberrant de bêtise, le film de Ben Wheatley s’avère être dès lors un navet sans nom, lui qui se donne des airs de film cool, avec ses petites vannes entre protagonistes principaux et ses situations cocasses, lesquelles sont pourtant très mal incrustées, annihilant toute tension, eux qui s’en sortent toujours au bonheur la chance. Pour les autres, les personnages secondaires sont totalement transparents et les antagonistes génériques et prévisibles, au contraire de Statham et Jiuming, qui se prennent pour des rois sous - et hors de - l’eau, capables de tout. Sans jamais perdre une seule goutte de sens, les deux gaillards se lancent sans cesse ici des piques à la façon d’une bromance, le second jouant tout le temps avec la mort, pendant que sa nièce, elle, ne sert qu’à se mettre dans des situations périlleuses, sans jamais écouter. Tout le film repose alors sur ces individus pour lesquels on n’éprouve absolument rien, si ce n’est l’envie qu’ils se fassent - désolé - avaler tout cru, tellement ils sont risibles, et surjouent.

En plus de se prendre beaucoup trop au sérieux, l’action se fait en plus attendre (du moins, celle pour laquelle on était venus en salle), en plus de ne pas tenir la route, et de boire la tasse. "En Eaux (Très) Troubles" est dès lors le genre de suite qui ne savait pas quoi faire de son matériel de départ, mais qui s’est lancée, la gueule ouverte, par l’appât du gain, quitte à nous pondre une supercherie abrutissante, et indigne à la fois du prix que le spectateur va débourser et, osons le dire, de son prédécesseur. Que dire aussi des effets spéciaux, superficiels et pas toujours nets (les plans filmés des mégalodons sont nauséabonds), alors qu’une partie de l’intrigue évolue dans les eaux (forcément) troubles de la fosse des Mariannes, ce qui ne nous permet d’y voir très clair, tandis que les megs et autres bestioles abyssales, n’apparaissent ici finalement qu’en second plan ? Car la star du film, c’est bien Jason Statham, lequel part à la pèche au mégalodon, sur un jet ski, armé de harpons explosifs bricolés, tout en réussissant à tuer des monstres - en transe - mesurant entre cinq à dix fois sa taille, eux qui sont pourtant armés de dents de plus de vingt centimètres de longueur, de quoi n’en faire qu’une bouchée. Mais c’est mal connaître les pouvoirs et l’aura de l’acteur, plongé dans un film stupide, ennuyeux, qui nous rappelle en plus, instantanément, qu’on est bien ici dans une co-production chinoise grandiloquente, ayant la mainmise, et cela jusqu’à la musique du film, outre la bande-originale d’Harry Gregson-Williams, qui revient ici après celle du premier film. Car trop, c’est trop. Or, "En Eaux (Très) Troubles", ce n’est que de la surenchère, mais qui ne tient pourtant pas ses promesses...



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