Synopsis : 2001. Le journaliste Denis Robert met le feu aux poudres dans le monde de la finance en dénonçant le fonctionnement opaque de la société bancaire Clearstream. Sa quête de vérité pour tenter de révéler « l’Affaire des affaires » va rejoindre celle du juge Renaud Van Ruymbeke, très engagé contre la corruption. Leurs chemins vont les conduire au coeur d’une machination politico-financière baptisée « l’affaire Clearstream » qui va secouer la Vème République.
Acteurs : Gilles Lellouche, Charles Berling, Laurent Capelluto, Florence Loiret-Caille, Jonathan Louis.
Comme ancien officier de police judiciaire dans une section financière d’élite (aujourd’hui dissoute) du Royaume, le troisième film de Garenq (après le très bon Présumé coupable et le plus anecdotique Comme les autres) ne pouvait que me passionner. Malgré quelques problèmes et incohérences, le résultat final m’a enthousiasmé.
Les affaires Clearstream, les frégates taïwanaises, le juge Van Ruymbeeke ont marqué la France et révélé des scandales à l’échelon international. Si les français ont été touchés, marqués par ces "affaires" (qui ont dépassé les frontières de l’Hexagone) c’est notamment grâce à un journaliste, Denis Robert, incarné à l’écran de façon magistrale par Gilles Lelouche.
L’affaire, les affaires,... non, écrivons plutôt "L’enquête" - le nom seul est ici comme une "marque" qui l’auréole d’un statut d’exception, d’un singularité d’excellence - est controversée et il ne s’agit pas ici de reprendre le déroulement du film [qui commence par l’arrestation de Denis Robert... pour revenir en arrière, au(x) début(s)]. Tout cela se trouve dans les livres de Denis Robert et, à défaut, sur Wikipedia. D’ailleurs, le réalisateur (avec l’aide du journaliste) ne vise pas tant à nous relater ces affaires qu’à nous faire découvrir un homme, don Quichotte des temps modernes et son combat contre les moulins financiers qui broient l’argent pour le transformer en une farine bien blanchie (fut-elle rougie par le sang !). Un homme, son combat, passionné et passionnant, certes, mais aussi une interpellation "politique", non pas tellement en ce qu’elle concernerait la politique politicienne - certes ici en question - mais plutôt celle qui concerne la gestion de la cité, vue ici comme un monde global où seul l’argent compte.
Les dernières révélations concernant le Luxembourg, divulguées au moment même de certaines grèves en Belgique en fin 2014 viennent rappeler que tout cela est loin d’être terminé malgré l’enquête de notre preu journaliste. Interpellation de la part du réalisateur après celle de Présumé coupable ! C’est que même si le film se consacre d’abord à son protagoniste principal il est aussi une dénonciation de toutes les magouilles financières et politiques malgré d’éventuels dénis et non-lieux. D’ailleurs, magouille est un mot bien trop faible et cette dimension qui dépasse l’humain, implique des hommes politiques et financiers au plus haut niveau et transcende les frontières est donc également présente dans le film.
Cependant, j’y vois et découvre avant tout le combat d’un homme passionné dont la passion risque de le détruire, ainsi que son foyer et les rares amis. C’est aussi, en marge, le combat d’un juge (et on se rappelle ces "petits juges", opposés aux puissants, que le cinéma met parfois en exergue). Le combat, la quête de vérité de ce journaliste va rejaillir sur sa vie familiale. Celle-ci - peut-être un des maillons plus faible du film - est probablement romancée ici et l’on découvre que Denis peut "péter les plombs" (voir la scène avec ses filles à la sortie du supermarché).
Quant au film lui-même, le réalisateur fait plus ici le choix d’un film "policier" et d’action (et nous sommes donc très loin de Présumé coupable). C’était probablement, voire certainement, nécessaire, pour que le message passe sans noyer le spectateur dans les tenants et aboutissants d’une enquête qui a duré de très longues années. Le film va donc mont(r)er de façon très "énergique" certaines actions policières. Cela apporte un couleur et une dynamique au déroulement de l’action. De ma propre expérience professionnelle antérieure, les interventions sont assez crédibles (perquisitions, interrogatoires,...) sauf sur un point : dans L’enquête, les policiers ont toujours une place pour se parquer juste devant le lieu de l’intervention. Cela, je n’ai jamais vécu... ici, il y a donc le dieu ou la magie du cinéma ! Assez crédible aussi l’univers de ces années-là. Je songe aux téléphones mobiles, à l’Imac du journaliste, même s’il me semble utiliser très (trop) longtemps son système d’exploitation OS 9 (mais c’est ici remarque de geek travaillant sur du matériel Apple !).
En gros, un film à recommander (malgré quelques faiblesses) pour la relecture du parcours d’un homme qui a combattu pour la vérité mais également par le regard qu’il jette sur l’univers des dérives financières qui gangrènent le monde avec une interprétation magistrale de Gille Lellouche.