Genre : Drame
Durée : 135’
Acteurs : Halle Bailey, Javier Bardem, Melissa McCarthy, Daveed Diggs, Jonah Hauer-King, Awkwafina, Jacob Tremblay, Lin-Manuel Miranda, Art Malik...
Synopsis :
Ariel, la benjamine des filles du roi Triton, est une jeune sirène belle et fougueuse dotée d’un tempérament d’aventurière. Rebelle dans l’âme, elle n’a de cesse d’être attirée par le monde qui existe par-delà les flots. Au détour de ses escapades à la surface, elle va tomber sous le charme du prince Eric. Alors qu’il est interdit aux sirènes d’interagir avec les humains, Ariel sent pourtant qu’elle doit suivre son cœur. Elle conclut alors un accord avec Ursula, la terrible sorcière des mers, qui lui octroie le pouvoir de vivre sur la terre ferme, mais sans se douter que ce pacte met sa vie et la couronne de son père en danger...
La critique de Julien
Avec son remake en live-action de "La Petite Sirène", Disney prend une nouvelle fois l’eau, malgré ses belles intentions. On pourrait même parler de petit naufrage, sous l’océan ! Après avoir déjà essuyé l’année dernière les échecs commerciaux de "Avalonia : l’Étrange Voyage" et de "Buzz l’Éclair", pour laquelle elle vient justement de tristement licencier son réalisateur Angus MacLane et sa productrice Galyn Susman (lesquels faisaient pourtant partie de Pixar depuis les années 90), ainsi que 73 autres employés afin de limiter la case, la firme aux grandes oreilles dégaine ainsi un nouveau remake en prises de vue réelles d’un de ses classiques d’animation, soit celui de "La Petite Sirène" (1989), lui-même inspiré du conte du même nom d’Hans Christian Andersen, publié en 1836. Réalisé par le faiseur de comédies musicales Rob Marshall, à qui l’on doit - déjà pour Disney - l’enthousiasmant "Retour de Mary Poppins" (2018), "La Petite Sirène" avait alors pour ambition d’attirer un très large public familial multigénérationnel dans les salles, à la manière de "Aladdin" (2019) de Guy Ritchie ou du "Roi Lion" de Jon Favreau (alors que les récents "Pinocchio" de Robert Zemeckis et "Peter Pan et Wendy" de David Lowery ont fini sur Disney+). Or, cela semblait déjà mal embarqué dès la préproduction du film. En effet, cela fait quatre ans maintenant que le film subit une stupide et énorme vague de polémiques, étant donné le choix de son actrice principale, en la personne de la chanteuse Halle Bailey, et cela étant donné sa couleur de peau (et ses dreadlocks), alors que la petite sirène du dessin animé, Ariel, était de couleur blanche, arborant une somptueuse chevelure rouge. Beaucoup de bruit pour rien alors que les origines des sirènes du romancier H.C Andersen n’ont jamais été clairement définies. Mais alors que les puristes du film original fustigent ce choix, et que son actrice est depuis victime de virulents propos racistes, "La Petite Sirène" est aujourd’hui la cible de "review bombing", consistant à publier en masse des avis négatifs dans le but de nuire au film. Autant donc dire qu’il faut se faire son propre avis sur ce film, ou lire - bien entendu - ceux des professionnels. Nous concernant, c’est optimiste que nous nous sommes jetés à l’eau, pour prendre le large, en compagnie de Ariel, Sébastien, Eurêka et Polochon...
Tout d’abord, insistons sur une grande différence entre la première œuvre adaptée qui durait à peine 84 minutes à l’écran, contre 135 pour ce remake, soit près de 50 minutes d’images en plus ! Pourtant, "La Petite Sirène" n’a curieusement rien de plus à raconter que son aîné, mais sans doute bien plus à appuyer, à délier, à chanter, alors que le compositeur Alan Menken est de retour sur la bande originale du film, tandis qu’il a coécrit de nouvelles chansons aux côtés de Lin-Manuel Miranda, quant à lui coproducteur du film. Des paroles (celles de "Embrasse-la" et "Pauvres âmes en perdition") ont ainsi été - comme d’accoutumée - modifiées pour coller davantage à notre époque et aux mœurs, tandis que des titres ("Filles du roi Triton" et "Les Poissons") n’ont tout simplement pas trouvé ici leur place. Dédié à feu Howard Ashman, qui avait coproduit et coécrit les chansons du film original, le métrage de Rob Marshall assume alors sa plus longue durée dans sa volonté de réécrire ladite histoire d’Ariel et de l’inclure - comme son choix d’actrice - dans une optique plus inclusive, moderne, visant l’indépendance et l’épanouissement de son personnage principal, alors qu’Ariel va désobéir ici à son père, le roi Triton (Javier Bardem), souverain des sirènes d’Atlantica, en remontant à la surface, alors que sa mère a été tuée par un humain. Pourtant, c’est elle qui va sauver le prince d’un royaume insulaire des Caraïbes du naufrage de son bateau, en pleine tempête. Grâce à sa voix de sirène, Ariel va, tel un enchantement, créer une connexion entre elle et Éric (Jonah Hauer-King), elle qui va éperdument en tomber amoureuse, avant qu’il n’ait pourtant le temps de reprendre pleinement conscience... Furieux d’apprendre son escapade de la bouche de son majordome Sébastien, le Roi, indigné, va détruite la collection d’objets humains de sa fille, cette dernière ne lui jurant pas de ne pas remonter à la surface. C’est là que la sirène sera alors approchée par une paire de murènes, appartenant à la Sorcière des mers, Ursula (Melissa McCarthy) - qui est en réalité sa tante, laquelle va lui proposer un marché en la transformant en humaine pendant trois jours, elle qui devra recevoir un "baiser d’un véritable amour" pour espérer rester humaine de façon permanente. Sauf que cet accord lui fera également perdre sa voix (dans tous les sens du terme), sa queue, et sa capacité de respirer sous l’eau, Ursula ayant pour objectif de l’empêcher d’approcher Éric (lequel aura d’autant plus difficile de reconnaître en Ariel celle qui l’a sauvée). Or, si elle échoue, Ariel appartiendra à Ursula, qui pourra espérer conquérir Atlantica et posséder le trident de Triton, en le manipulant...
C’est curieusement après la vision de "La Petite Sirène" que l’on se rend d’autant plus compte à quel point le travail technologique et immersif de James Cameron fut fabuleux sur "Avatar 2 : la Voie de l’Eau", étant donné que le film de Rob Marshall baigne ici dans des effets numériques illisibles, qui donnent à voir de trop nombreux plans réalisés sur fonds verts, alors que "La Petite Sirène" est censé refléter toute la beauté du monde sous-marin. Pourtant, dès l’ouverture, rien ne semble ici réel, ni encore moins nuancé, étant donné des couleurs trop sombres, des problèmes de profondeurs, des attributs humains (barbes, cheveux, etc.) qui flottent sous l’eau plutôt que de retomber, tandis que les sirènes parlent sans que des bulles d’oxygène ne remontent à la surface, etc... De plus, l’écosystème aquatique est ici très peu diversifié, et ne donne pas à voir grand-chose de véritablement beau à l’écran. Les queues des sirènes numérisées se remarquent également à l’image, vis-à-vis du reste du corps, alors que les regards figés (sous l’eau ?) des acteurs peinent à soulever en nous une quelconque émotion autre que celle de l’embarras. Ainsi, pauvres Javier Bardem et Melissa McCarthy, figurant dans un océan de clichés, alors que Jonah Hauer-King ne dégage, quant à lui, absolument rien dans la peau du prince Éric. Heureusement, Halle Bailey, et son joli minois de sirène, sauve l’honneur, surtout lorsqu’elle quitte l’eau pour rejoindre la terre ferme, tandis qu’elle chante à merveille, alors que Sébastien, forcément réalisé en images de synthèse, amuse la galerie, au même titre que ses autres amis Eurêka (un fou de Bassan du Nord) et Polochon (un poisson sergent major des Caraïbes).
Malgré sa volonté de rafraîchir son catalogue, Disney n’apporte pourtant ici aucun honnête intérêt à ce pâle remake de "La Petite Sirène", lequel ennuie plus qu’il ne passionne, et arrive sans doute avec un peu en retard, au regard de ses confrères blockbusters qui se déroulent sous l’eau. Alors certes, les représentations ont ici évolué en leur temps, l’évolution de la technologique (malheureusement utilisées ici à outrance) permettra aux plus jeunes d’apprécier le spectacle et les messages sont ici ouvertement bienveillants (surpasser les préjugés, aimer la personne de son choix, pardonner, etc.), écolos et socio-culturellement progressistes, mais l’ensemble demeure opportuniste et niais dans la manière, tout en renvoyant à l’image du conte de fées, qu’est finalement le roman d’Hans Christian Andersen. Mais rien n’y fait, puisque cette relecture maladroite et artificielle du classique de John Musker et Ron Clements (lesquels ont coréalisé "Vaiana : La Légende du Bout du Monde" sorti en 2016, et bientôt adapté en live-action) nous fait davantage boire la tasse qu’elle nous permet de respirer à pleins poumons...