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Cinécure est un site appartenant à Charles Declercq et est consacré à ses critiques cinéma, interviews sur la radio RCF Bruxelles (celle-ci n’est aucunement responsable du site ou de ses contenus et aucun lien contractuel ne les relie). Depuis l’automne 2017, Julien apporte sa collaboration au site qui publie ses critiques et en devient le principal rédacteur depuis 2022.

Jonathan Barré
Bonne Conduite
Sortie du film le 19 avril 2023
Article mis en ligne le 19 avril 2023

par Julien Brnl

Genre : Comédie

Durée : 95’

Acteurs : Laure Calamy, Tchéky Karyo, David Marsais, Grégoire Ludig, Thomas VDB, Olivier Marchal...

Synopsis :
Pauline a une méthode bien à elle pour faire de la prévention routière : formatrice dans un centre de récupération de points le jour, elle se transforme en serial killeuse de chauffards la nuit.

La critique de Julien

Un peu plus d’une année après leur précédente collaboration "Les Vedettes", le metteur en scène Jonathan Barré et les trublions du Palmashow, David Marsais et Grégoire Ludig, refont équipe pour "Bonne Conduite", une comédie policière quelque peu... barrée, où l’omniprésente Laure Calamy tient le rôle principal. Cette dernière y incarne le rôle de Pauline, une ancienne psychologue devenue formatrice de stages de récupération de points en prévention routière, et cela depuis que son compagnon (Thomas Ngijol, en photos) est mort d’un accident de la route, survenu alors qu’un conducteur n’avait pas respecté leur priorité, elle qui conduisait la voiture, ayant fait dès lors une embardée, par réflexe, conduisant au drame. Sauf que sur le terrain, afin d’éviter qu’il y ait d’autres victimes innocentes de conduites dangereuses, Pauline s’y prend avec des méthodes peu orthodoxes. En effet, la nuit, elle venge la mort de Dorian, au volant d’une Subaru Impreza noire, où elle traque en réalité ses propres stagiaires les plus imbus d’eux-mêmes, et avides de vitesse. Mais ce qu’attend surtout Pauline, en plein deuil, c’est la remise en liberté imminente du responsable de la mort de son compagnon. Mais ses plans dévieront de trajectoire après qu’un de ses stagiaires et amateur (Tchéky Karyo) survivra - par surprise - à l’une de ses attaques, au cours de laquelle elle avait, en plus, oublié d’enfiler sa cagoule blanche... De leur côté, le commandant Kervella (David Marsais) et son collègue, le capitaine Giordano (Grégoire Ludig), retrouveront une voiture calcinée avec, dans son coffre, un homme brûlé...

Une fois de plus, Jonathan Barré mélange les genres dans "Bonne Conduite", lequel passe ici de la comédie noire et burlesque au drame, et cela parfois en une fraction de seconde, tandis que l’atmosphère de son film repose, quant à elle, sur une ambiance proche du thriller, au regard notamment de la musique électro baignée de synthés de son fidèle collaborateur Charles Ludig (le frère de Grégoire), rendant hommage aux films de John Carpenter. Or, le cinéaste ne cache aucunement le côté patchwork de son métrage, lequel emprunte le point de départ de son intrigue au documentaire "Tout est Permis" (2014) de Coline Serreau, tandis qu’il y fait d’innombrables clins d’œil de cinéphile "compulsif" à des films de son enfance tels que "Usual Suspects" de Bryan Singer (1995), "Seven" (1996) de David Fincher, ou encore "Rocky" de John G. Avildsen (1976), pour remonter plus loin. "Bonne Conduite" est aussi un film voulu comme un "Fargo" (1996) des Frères Coen, mais en Bretagne. Bref, on sent le cinéma de son auteur très référencé, s’en amusant longuement, à défaut d’être toujours justifié à l’écran...

Visuellement, la photographie de Sébastien Cros est très plaisante (surtout de nuit), tandis que le réalisateur utilise de nombreux mouvements de caméra pour diversifier l’utilisation de l’image, comme des plans éloignés puis rapprochés, des zooms sur image, alors qu’il utilise aussi, à divers moments, des filtres sur son objectif pour donner, d’une part, de la profondeur au cadre et, d’autre part, deux zones de netteté différente, ce qu’on appelle une demi-bonnette. "Bonne Conduite" ne manque dès lors pas de charme, bien qui pêche à trouver sa propre identité. D’ailleurs, en termes d’écriture, "Bonne Conduite" effectue quelques sorties de route, étant donné des invraisemblances ou facilités dans le déroulé de son intrigue policière assez balisée, tandis que le ton global de l’histoire peine à convaincre pleinement sur la longueur, étant donné ses incessantes ruptures de ton. Qu’à cela ne tienne, on parvient à faire bonne route en compagnie de ces usagers de la route, en quête de vitesse...

Inclassable, le film l’est, d’autant plus qu’il est porté par l’actrice caméléon qu’est Laura Calamy, capable de tous les possibles. On s’amuse dès lors ici autant des situations cocasses qu’on pourrait être ému des séquences plus émotionnelles, bien que le film soit davantage tourné vers la comédie, et le second degré, étant donné notamment la présence au générique d’un duo d’enquêteurs de police assez lents, lequel est formé par Ludig et Marsais, habitués à jouer les idiots de service. Le premier s’avère ici très loquace et fute-fute, tandis que le second trop rapidement émoustillé par les avancées de leur travail, lesquels remontent dès lors la piste des événements, au compte-gouttes, mais toujours une guerre de retard, eux qui sont notamment incapables de voir des indices pointant pourtant devant leurs regards, ou derrière leurs dos. Tchéky Karyo s’avère également très remonté, et ici à contre-emploi, tandis que d’autres seconds-rôles viennent compléter l’affiche du film, avec plus ou moins d’importance dans le déroulé de l’intrigue, dont Thomas VDB, touchant en ostréiculteur récemment divorcé et père d’un fils de six ans qu’il ne voit pas beaucoup, lequel a du mal à joindre les deux bouts, tout en étant tombé amoureux de Pauline lors d’un stage, lequel essaie alors, avec beaucoup de maladresse, de l’inviter à goûter ses huîtres...

Dans l’ensemble, "Bonne Conduite" est donc un sympathique divertissement décalé, parsemé de jolis moments de comédies (bien que certains ne fonctionnent guère), lui qui doit beaucoup à ses personnages principaux assez foireux, eux qui n’appuient jamais sur le frein, au contraire de l’intrigue, qui elle perd en efficacité et originalité en cours de route. Le film de Jonathan Barré ne parvient dès lors pas à tenir ses promesses de singularité jusqu’à la ligne d’arrivée. Mais ne boudons pas notre plaisir face à ce film loufoque, qui mérite ainsi quelques points de récupération sur son permis.



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