Genre : Drame
Durée : 89’
Acteurs : Isabelle Carré, Théodore Pellerin, Ursina Lardi, Ivan Georgiev, Adama Diop...
Synopsis :
Nathalie Adler est en mission pour l’Union Européenne en Sicile. Elle est notamment chargée d’organiser la prochaine visite de Macron et Merkel dans un camp de migrants. Présence à haute valeur symbolique, afin de montrer que tout est sous contrôle. Mais qui a encore envie de croire en cette famille européenne au bord de la crise de nerfs ? Sans doute pas Albert, le fils de Nathalie, militant engagé auprès d’une ONG, qui débarque sans prévenir alors qu’il a coupé les ponts avec elle depuis des années. Leurs retrouvailles vont être plus détonantes que ce voyage diplomatique...
La critique de Julien
Entre comédie et drame, "La Dérive des Continents (au Sud)" est le nouveau long métrage du metteur en scène suisse Lionel Baier, à qui l’on doit une filmographie qui alterne fictions et documentaires de formats divers, lequel est d’ailleurs ici le troisième film de sa tétralogie sur l’Europe. Tandis qu’il en a commencé l’écriture à la suite des premières grandes crises migratoires en Méditerranée en 2014, le cinéaste, profondément convaincu par la construction européenne, filme ici, en Sicile, les coulisses de la venue fictive présidentielle "d’M&M’s", à savoir Emmanuel Macron et d’Angela Merkel, dans un camp de réfugiés, installé dans une ancienne base de l’OTAN, construite au moment de la Guerre Froide. Isabelle Carré y interprète alors Nathalie, travaillant pour l’Union européenne en tant qu’officier de liaison, notamment chargée de permettre aux médias d’informer sur l’urgence humanitaire. Alors qu’arrivent sur place un conseiller spécial de Macron (Tom Villa) au discours complètement absurde ("Avant Manu, rien ne va, après Manu, ça ira...") et une déléguée allemande (Ursina Lardi), ces derniers vont devoir organiser cette venue impromptue, ciblée autour de l’action proactive des Gouvernements agissant pour les opérations d’accueil aux migrants sur le sol européen, tout en montrant aux médias ce que les diplomaties veulent leur montrer, même si ça n’est pas toujours l’exacte réalité... En parallèle, Nathalie retrouvera son fils adolescent (Théodore Pellerin), travaillant pour une ONG, elle qui l’aurait "abandonné" il y a neuf ans de cela, alors qu’elle fuyait le foyer familial...
À petite et grande échelle, Lionel Baier et son coscénariste Laurent Larivière s’arrêtent ici aux portes de la crise du COVID (eux qui n’ont eu de cesse de courir après l’actualité) et nous montrent les failles de l’Europe dans sa gestion de la crise migratoire - aux méthodes discutables - et comment les problématiques des civilisations peuvent découler sur l’intimité des individus. Porté par la toujours douce Isabelle Carré, et par une relation mère-fils tumultueuse, mais réparatrice, ressoudée pour l’occasion autour d’une même cause, "La Dérive des Continents (au Sud)" est une comédie dramatique qui offre un regard inédit sur le sujet qu’elle aborde, sans jamais cependant regarder les migrants dans le blanc des yeux (outre lors d’une scène de revendications qui arrive bien tard), ni toucher, étant donné un ton de mise en scène qui ne prend jamais position, et quelques exubérances scénaristiques surréalistes ou stéréotypées qui nous éloignent du drame qui sous-tend les propos plus que d’actualité du film. Ce dernier est en tout cas l’occasion d’y découvrir les ruines du tremblement de terre Gibellina au nord-ouest de la Sicile, œuvre de l’artiste Burri, utilisée ici comme métaphore d’un monde fragile, dont on ne maîtrise pas la force imprévisible de la nature, dont la dérive des continents, responsable de bien des drames, notamment des deux côtés de la Méditerranée.