Genre : Horreur, thriller
Durée : 114’
Acteurs : Neve Campbell, Jenna Ortega, Courteney Cox, David Arquette, Melissa Barrera, Dylan Minnette, Kyle Gallner, Dylan Minnette...
Synopsis :
Vingt-cinq ans après qu’une série de meurtres brutaux ait choqué la ville tranquille de Woodsboro, un nouveau tueur a revêtu le masque de Ghostface et commence à cibler un groupe d’adolescents pour ressusciter les secrets du passé meurtrier de la ville.
La critique de Julien
On ne pourra pas reprocher à la saga "Scream" de ne pas avoir joué cartes sur table. Tout en étant le cinquième volet de la franchise à succès réalisée par Wes Craven et écrite par Kevin Williamson (excepté le troisième opus), ce nouveau volet est sobrement intitulé "Scream", lui qui n’est pourtant par un remake, ni un reboot, mais plutôt une sorte de requel, soit un mix entre une suite et un remake. Réalisé par le duo de réalisateurs Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett, lesquels avaient déjà réalisé le très sympathique "Wedding Nightmare" en 2019, et pensé comme un hommage au défunt réalisateur de la quadrilogie originelle, cet épisode prend donc place vingt-cinq ans après la première tuerie de Woodsboro, alors qu’une bande d’adolescents est prise pour cible par un tueur portant le masque de Ghostface, ce qui va forcer certains d’entre eux à faire face à de lourds secrets...
Nerveux et réflexif, il faut savoir que "Scream" puisse ses sources dans le "matériel source", d’où l’utilité d’avoir revu le premier épisode afin de pleinement pouvoir profiter ici de la nouvelle boucherie, laquelle joue à fond le jeu du méta, de ce préfixe grec signifiant "après, au-delà de, avec". Et quitte à jouer le rôle d’épisode tampon, "Scream" a le mérite de réinviter ses fantômes du passé dans la partie, mais aussi le malheur d’appuyer des références à la fois trop et peu ménagées pour le (jeune) néophyte. Espérons dès lors que le sixième opus, s’il devait voir le jour, prendra pleinement position d’enjeux présents, et cessera de fouiller le passer pour se justifier.
Si les précédents films s’amusaient déjà des règles et stéréotypes du sous-genre horrifique du slasher tout en les détournant, cet épisode va encore un cran plus loin dans sa réflexion, et offre une analyse satire de l’évolution de l’horreur au cinéma, au regard de la franchise "Stab", soit ici le "film dans le film", inspiré du livre de Gale Weathers (Courtney Cox) "Les Meurtres de Woodsboro", basé lui-même sur la vie de Sidney Prescott (Neve Campbell). La trajectoire de "Stab" est en effet ici moquée par ledit groupe d’adolescents, le huitième épisode, venant de sortir, n’ayant plus aucun lien avec la trilogie originale, inspirée donc par les événements auxquels Sidney Prescott a dû faire face. Si Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett et le duo de scénaristes James Vanderbilt et Guy Busick ont de la suite dans les idées, et en jouent à leur tour, tout étant respectueuse de l’héritage de Wes Craven, "Scream" a l’autodérision de citer d’autres récents films d’horreur sortis récemment, prétendant renouveler eux-mêmes l’horreur telle qu’on l’entend, lequel les considère ainsi comme "prétentieux", à charge contre le cinéma de Robert Eggers, Ari Aster ou encore de Jordan Peele. Il fallait oser, d’autant plus que si la saga "Scream" a toujours aimé brouiller les pistes, elle n’a pourtant jamais effrayé autant qu’elle le supposait. Car sa renommée, elle la doit bien à son univers, dont au tueur, Ghostface, sous son costume de fantôme et armé d’un couteau, devenu un phénomène de société, ayant permis de lancer à lui seul une vague de nouveaux slashers, ainsi qu’à son casting original, auquel ses acteurs sont toujours identifiés.
Tandis qu’il se moque donc lui-même de sa propre existence, ainsi que des clichés du cinéma horrifique (la scène d’ouverture, la balle dernière dans la tête, le mobile - en lien avec le passé - du tueur, les suspects, etc.), et de son impact médiatique et culturel, "Scream" est une mise en abyme qui essaie donc de trouver de nouveaux rebondissements pour continuer d’exister, ce qu’il parvient sans mal, même s’il se poignarde parfois lui-même avec les propres poncifs qu’il dénonce ici. Soit il se considère donc lui-même comme une parodie, soit son écriture n’est pas aussi maligne qu’elle le prétend, et donc maladroite. Comment ainsi certains protagonistes parviennent à souffrir atrocement le temps d’une scène, puis gambader durant celle d’après, elle qui est pourtant située dans un laps de temps très court (si ce n’est quelques secondes, minutes), alors qu’ils viennent de se prendre un coup de couteau, ou une balle ? Mais on parierait plutôt sur notre première idée, d’autant plus que cet épisode brise ici l’aura de ses grandes figures précédemment installées, et prend des libertés vis-à-vis desdits stéréotypes du genre.
Si on apprécie donc ce nouvel opus, c’est d’une part pour les écarts qu’il prend vis-à-vis des règles du jeu prises ici par ce nouveau Ghostface, mais également pour la trajectoire et conséquences de ses (tentatives de) meurtres. Extrêmement brutaux et sans cœur (on a que faire de ce qui arrive à ces jeunes adolescents), ces derniers redonnent ainsi un nouveau souffle aux attaques au couteau (non, le tueur ne se cache pas toujours derrière une porte !), d’autant plus que les réalisateurs parviennent ici à filmer ces dernières de manière à ce que le public ressente lui-même sur sa peau cette lame prête à la trancher. Et autant dire que des litres de sang coulent ici, ce qui ravira ceux qui sont venus chercher ici du bodycount ! Aussi, cette histoire offre une belle rédemption au personnage déjà bien amoché et campé par David Arquette, lequel a notamment marqué la quadrilogie, prouvant que l’univers est enfin prêt à prendre un nouvel départ, que les fans accepteront ici, ou non. À cet égard, les retrouvailles entre le flic maintenant retraité qu’il joue et son ex Gayle Weathers, jouée par Courtney Cox, font d’ailleurs mouche, et touchent le temps d’un dialogue, sur la scène d’un double crime. Concernant maintenant le personnage de Cox et de Neve Campbell (très effacée), on pourrait regretter que ces derniers soient sous-exploités. Pourtant, leur présence sur place est déjà un beau cadeau en soi, d’autant plus que Sidney et Gayle connaissent tous les ingrédients de la supercherie, tout en étant tout de même des victimes. Et c’est sans doute là notre plus grand regret, soit de vouloir jouer au "girl power" plus malin, tout en tombant dans le ravin, elles qui semblent d’autant plus increvables que l’est Ghostface. Qu’à cela ne tienne, le plaisir de les retrouver est intact, et la nostalgie au rendez-vous.
Reste à savoir maintenant si la manœuvre ici orchestrée est de bonne augure pour une quelconque suite. Car cinématographiquement, ce "Scream" est bien plus occupée à se regarder le nombril qu’à finalement assurer ses arrières, et à mériter sa place dans le paysage du cinéma d’horreur, lui qui ne propose en effet pas grand-chose de nouveau. Quel avenir donc pour la franchise ? S’il est vrai qu’il est un plaisir coupable méritant, et quelque part impertinent, on préfère nous aussi "The Babadook" (2014) de Jennifer Kent. Pour comprendre ce clin d’œil, il faudra vous rendre en salle... Et vous, quel est donc votre film d’horreur préféré ?