Genre : Drame, biopic
Durée : 157’
Acteurs : Lady Gaga, Adam Driver, Jared Leto, Al Pacino, Jack Huston, Jeremy Irons, Salma Hayek, Camille Cottin, Mehdi Nebbou...
Synopsis : :
Le film est basé sur l’histoire vraie de l’empire familial qui se cache derrière la célèbre marque de luxe italienne. Sur plus de trois décennies de passions, trahisons, décadence, vengeance et finalement meurtre, le film met en scène ce que signifie un nom, ce qu’il vaut et jusqu’où une famille peut aller pour reprendre le contrôle.
La critique de Julien
Un peu plus d’un mois après son dernier film "Le Dernier Duel" (devenu un gros échec commercial malgré une presse unanime), Ridley Scott dégaine "House of Gucci", débarquant donc à temps pour la course aux Oscar, lequel est adapté du livre "The House of Gucci : A Sensational Story of Murder, Madness, Glamour, and Greed", écrit par Sara Gay Forden, et publié en 2000, lequel qui revient ainsi sur le meurtre le 27 mars 1995 de Maurizio Gucci, petit-fils et héritier du fondateur de la marque de luxe italienne Gucci, et cela par son ex-femme, Patrizia Reggiani. Surnommée la "Veuve noire", cette dernière a été condamnée à une peine de 26 ans de prison, laquelle en a finalement purgés 18. Attendu notamment par les fans de Lady Gaga, elle qui y campe Patrizia Reggiani, rôle pour lequel elle a déjà reçu (tout récemment) le trophée de la meilleure actrice au New York Film Critics Circle, "House of Gucci" est ni plus ni moins qu’une sulfureuse et inexacte chronique familiale de la dynastie Gucci, décimée par la lutte vénale de ses pairs pour le contrôle de la marque de mode italienne Gucci, laquelle n’appartient cependant plus à la famille en question, et cela depuis bien longtemps...
Le film débute alors en 1978, lorsque Patrizia Reggiani (Gaga, donc), jeune et séduisante femme qui travaille comme chef de bureau dans la petite entreprise de camionnage de son père, rencontre Maurizio Gucci (joué par Adam Driver, décidément partout), étudiant en droit et futur héritier à 50% des parts de la maison de couture Gucci, et cela par l’intermédiaire de son père Rodolfo (Jérémy Irons), alors que son oncle Aldo (Al Pacino, ayant pris un sacré coup de vieux) et son cousin Paolo (Jared Leto, méconnaissable) détiennent l’autre moitié. Alors que l’arrivée de Patrizia sera vue d’un mauvais œil par Rodolfo, cette dernière exercera très vite une grande influence sur son époux, Maurizio, convenant à toutes sortes de magouilles, avant que leur histoire et celle des Gucci ne s’envenime...
Ce qui est à la fois plaisant et également ennuyant avec ce genre de film, c’est que l’on sait à quoi s’attendre en entrant dans la salle. Car "House of Gucci" ne ment pas sur la marchandise, et ressemble donc à un règlement de compte familial, en bonne et due forme, avec tout ce que cela appel de trahison, manipulation, et autre jalousie, au sein de la famille Gucci, ayant perdu la tête à cause de... l’argent. Avec ce projet de longue date, Ridley Scott réalise ainsi un film flamboyant, élégant, qui ne manque pas de style, et ne lésine pas sur les moyens, mais sans grande surprise à la clef. On suit donc avec intérêt ce portrait de famille - un peu spéciale - malgré quelques baisses de régime, étant donné un métrage de près de 160 minutes. Il faut donc vouloir se les coltiner (et pas seulement les minutes) ! Mais le casting, 100% glamour, est l’un des arguments de taille du film, même si Jared Leto y surjoue. À cet égard, Patricia Gucci, fille de Paolo Gucci (le personnage de ce dernier) a déploré la manière dont ont été représentés son père et son grand-père dans le film. Car c’est certain que pour les héritiers de Maurizio Gucci, et l’image de la famille Gucci, "House of Gucci" n’est pas une photo de famille idéale ! Ainsi, Lady Gaga, tantôt vénéneuse, calculatrice, puis "victime", est particulièrement à l’aise dans son rôle, de là à ce que son interprétation crie un peu trop à l’Oscar. D’ailleurs, on s’étonne à respirer enfin en cours de récit lorsque Maurizio l’éjectera de sa vie, quant à lui joué par le toujours classe Adam Driver. Mais tant qu’à faire, si les acteurs adoptent ici un accent italien pour des besoins du film, on est à même de se demander s’il n’était pas plus logique qu’ils apprennent l’italien (ou un simili), tant qu’à jouer la carte de l’authenticité, et de réaliser donc là un vrai exercice d’acteur, dans le but aussi de tourner le film dans la langue (supposée) dans laquelle se parlaient les membres de la famille Gucci entre eux. Cette question, épineuse, prouve une nouvelle fois que le grand Hollywood s’approprie superficiellement, pour utiliser à sa sauce, certes rentablement, mais quitte à modifier ce qui caractérise l’identité du matériau de départ...
L’autre souci du film, c’est sa trajectoire, toute tracée, sans prendre le temps de s’arrêter sur l’essentiel. En effet, même s’il est long, le film trace un trait net sur la profondeur psychologique des profils qu’il met en scène. Ainsi, on a bien du mal à comprendre ce qui a poussé Patrizia Reggiani à commanditer la mort du père de ses enfants (tout de même !), outre la colère, l’égo et la frustration. Certes, c’est déjà pas mal, mais la chute à l’écran ne justifie pas les moyens. Le scénario ne met ainsi pas assez en lumière le mal-être de ses personnages, se contentant de photographier, sans point de vue, des moments opportuns, dont la véracité peut, en plus, être discutée. Aussi, beaucoup d’ellipses rythment ce portrait (quid du procès ?), cependant parfaitement emballé, car au léger goût de scandale familial. Car ce que filme-là Ridley Scott, c’est bien une pure tragédie digne de Shakespeare, mais vraie dans les grandes - et pires - lignes, mais de laquelle on reste froidement à distance...