Synopsis : Rahim est en prison à cause d’une dette qu’il n’a pas pu rembourser. Lors d’une permission de deux jours, il tente de convaincre son créancier de retirer sa plainte contre le versement d’une partie de la somme. Mais les choses ne se passent pas comme prévu...
Acteurs : Amir Jadidi, Mohsen Tanabandeh, Fereshteh Sadrorafaii
Nous avions beaucoup apprécié Une séparation et plus encore Le client (entre autres). Ceux qui aiment le cinéma d’ Asghar Farhadi ne seront pas dépaysés même si "Un héros" pourra paraître plus mineur, moins incandescent que d’autres de ses films et aurait gagné à être un peu moins long (2h07). L’intrigue nous permet d’aborder la question du vrai et du faux, de la vérité, du mensonge et de l’enchainement dramatique des événements lorsque la frontière devient poreuse entre ces éléments. Même si l’intrigue paraîtra prévisible à certains, elle nous fait découvrir l’irréversibilité de l’action humaine (et nous employons ici les termes action et irréversibilité dans le sens que feue la philosophe juive Hannah Arendt ; dans la foulée l’on peut aussi ajouter ses réflexions sur l’imprévisibilité et la promesse). J’ai fait, en effet, un lien durant le film avec les réflexions de celle-ci, dans son livre La condition de l’homme moderne (1958) où elle traite de l’action humaine et des risques de celle-ci (cliquer sur le titre suivant pour découvrir une réflexion qui n’est pas indispensable pour voir le film !!!).
Lorsque Rahim promet de rembourser son créancier, lorsqu’il dérive de son plan initial son action aura des conséquences, lorsqu’il dit la "vérité" et qu’on l’invite à modifier un peu celle-ci, cette action va changer son avenir et celui d’autres personnes. Il est difficile ici d’en dire plus sans trahir l’intrigue, d’autant que celle-ci est prévisible, malgré l’imprévisibilité pour Rahim des conséquences des diverses altérations de la vérité. Ce qui n’est pas totalement un "vrai mensonge", mais pas non plus "la vraie vérité" va affecter ses proches en cascade, mais également les médias et le pays (via ceux-ci et les réseaux sociaux). Ce qui a été dit, mais n’était pas réel et qui est "modifié" pour servir les intérêts de responsables de la prison, de médias, de proches va s’amplifier jusqu’à ne plus pouvoir être contrôlé et que certains, tels Rahim, ne puissent plus se contrôler et qui ne pourra pas être caché au public. Il faut aussi entendre la voix du débiteur et de ses proches dans cette intrigue où le point de départ pourrait être simple malchance. Mais le film interroge aussi une société, son mode de fonctionnement et notamment sur l’importance liée au pardon par la personne offensée ou lésée (évoqué aussi dans le film Yalda, la nuit du pardon de Massoud Bakhshi, en 2019 ). Par ailleurs la question du mensonge avait aussi été abordée (autrement) par Abbas Kiarostami dans Nema-ye Nazdik (Close-up, en 1990).