Signe(s) particulier(s) :
– troisième long métrage d’Antoine Desrosières, auquel on doit des courts, des moyens métrages ainsi que des téléfilms ;
– sélectionné dans la section Un certain regard au Festival de Cannes 2018, lequel est sorti au cinéma en France le 20 juin 2018, tandis que le cinéaste lançait simultanément en ligne sa série "Yas & Rim", reprenant les mêmes personnages sulfureux, laquelle a remporté le prix de la meilleure série web SACD de l’année 2018.
Résumé : En l’absence de sa sœur Rim, que faisait Yasmina dans un parking avec Salim et Majid, leurs petits copains ? Si Rim ne sait rien, c’est parce que Yasmina fait tout pour qu’elle ne l’apprenne pas. Quoi donc ? L’inavouable… le pire… la honte XXL, le tout immortalisé par Salim dans une vidéo potentiellement très volatile.
La critique de Julien
Crise sanitaire oblige, les distributeurs dégainent des films en VoD en attendant la réouverture des cinémas, mais pas forcément ceux qu’on espérait. C’est ainsi durant cette période que Cinéart a choisi de sortir chez nous, et donc directement en VoD Premium, "À Genoux les Gars", soit une comédie décomplexée autour de la sexualité de jeunes musulmans, et en sous-texte des interdits sexuels culturels ou religieux, alors sortie au cinéma en France en juin... 2018 !
Réalisé par Antoine Desrosières, ce film succède à son moyen métrage "Haramistre" (2015), dans lequel deux jeunes filles voilées se retrouvaient prises entre l’étau des interdits et leurs désirs sexuels naissants (Inas Chanti et Souad Arsane étaient d’ailleurs déjà au casting). Ici, il est également question de la jeunesse musulmane et de la découverte de leur sexualité, en la personne de Yasmina et Rim, deux sœurs fusionnelles, ayant chacune un petit ami, avec l’un et l’autre des a priori sur des pratiques sexuelles qu’ils désirent, sans pour autant n’avoir aucune expérience dans le domaine. Yasmina se verra alors victime d’un affreux chantage sexuel, cédant à la demande de fellation du petit ami de sa sœur (alors en voyage scolaire), elle-même appuyée par son propre compagnon, par soutien sentimental à son ami (suite à l’absence de la copine de ce dernier)...
D’un côté, il y a les garçons rêvant de fellation plus que de baiser, et de l’autre le refus émancipateur des filles devant cet acte dévalorisant pour leur image. Certes, cette vision est stéréotypée, mais c’est pourtant le point de départ de toutes les discussions du film d’Antoine Desrosières, lequel traite ici d’un sujet grave sur le ton de la comédie centrée autour d’adolescents musulmans situés dans la fleur de l’âge, naïfs, et en pleine découverte de leur corps. Mais le cinéaste le fait assez maladroitement, en étant tout d’abord extrêmement bavard, tandis qu’il ne filme que ses quatre mêmes personnages, et sans véritable mise en scène établie.
Déstabilisant, "À Genoux les Gars" ressemble en effet davantage à du théâtre filmé, envahissant et surjoué, qu’à du cinéma, tellement la caméra colle ainsi aux baskets des personnages, prônant le dialogue improvisés (et crus) au visuel. On a d’ailleurs quelques fois la mauvaise impression de se retrouver devant un film amateur. Seuls quelques plans extérieurs permettent ainsi au spectateur de marquer de courtes pauses (bien méritées) dans ses échanges frontaux fatigants, mis en musique par des chansons intemporelles yé-yé ayant alors comme sujet principal les abus masculins envers sur les filles, elles qui se défendent en réponse, en affirmant leurs désirs. Impossible par contre de supporter les bruits de fellation, rajoutés en post-production, et simulant ainsi l’acte. De mauvais goûts, ceux-ci n’étaient tout simplement pas nécessaires...
Désarçonnant par sa (dé)construction cinématographique et son traitement très inégal du chantage sexuel, on déconseillera "À Genoux les Gars", à la fois loin d’être divertissant, et pertinent, mais plutôt dégradant pour ses sujets, et les questions qu’il soulève. Et en l’occurrence, on ne risque pas d’oublier sa scène d’ouverture, où la question du viol et de l’homosexualité sont abordés sans filtre selon le point de vue humiliant et peu respectueux de ses jeunes personnages, irréfléchis et incultes malgré eux.