Synopsis : En Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale, Jojo « Rabbit » Betzler, âgé de 10 ans, est maltraité par ses camarades. Il se console avec son ami imaginaire, Adolf Hitler. Amoureux de la « nation », il voit sa vie remise en cause lorsqu’il découvre que sa mère, Rosie, cache une jeune fille juive, Elsa Korr.
Acteurs : Roman Griffin Davis, Scarlett Johansson, Taika Waititi, Thomasin McKenzie, Sam Rockwell, Rebel Wilson, Alfie Allen, Stephen Merchant
Il n’est pas facile de (faire) rire avec Hitler. Même au cinéma. David Wnendt l’avait fait avec sa comédie satirique Er ist wieder da (Il est de retour) qui plaçait Hitler, de retour à l’époque actuelle. Le génial touche à tout Taika Waititi remet Hitler en scène ou plutôt, le met en scène à travers l’ami imaginaire de Jojo, un jeune garçon d’une dizaine d’années, très motivé pour défendre Hitler et sa cause et, (malheureusement ?) assez maladroit. Il s’agit clairement d’une comédie satirique ou plutôt d’un film en deux actes, le premier satirique, le deuxième dramatique. Mêler les deux genres n’est pas simple, s’agissant d’un thème comme celui d’Hitler et aussi des Juifs. Le réalisateur évite les embûches même si l’on est parfois au bord du précipice !
La première partie fera penser à Wes Anderson, particulièrement Moonrise Kingdom, pour l’intrigue, le jeu, loufoque et/ou décalé des acteurs et la colorimétrie (mais pas pour les mouvements de caméra, notamment les travelings verticaux et horizontaux). La seconde bascule plus dans l’horreur avec la chasse au Juifs, la présence des SS, de la Gestapo, les pendaisons. Le réalisateur bascule donc là dans une tout autre façon d’aborder cette fin de guerre, parfois jusqu’à susciter le malaise. C’est que le spectateur doit faire un quasi-virage à 180 degrés pour nous rappeler la réalité après la parodie. Si l’on pouvait rire dans le premier acte, il n’en est plus rien dans le second et s’il faut rire, c’est jaune !
Cette seconde partie surfe sur un thème déjà exploité au cinéma, celui d’une personne juive cachée par une autre allemande ! La rencontre entre le jeune (anti)héros et Elsa, la jeune fille juive, cachée dans la chambre de sa soeur défunte va modifier le comportement de Jojo. Ce sera parfois tragique, douloureux... Il faudra relacer des chaussures avant d’envoyer paître une illusion. Quel sera le prix à payer par chacun pour que la vérité se fasse jour et pour qu’un petit enfant puisse ouvrir les portes de l’adolescence et de l’âge adulte ?
C’est donc à découvrir dans un film drôle et tragique, ambigu parfois et porté par l’excellent jeune acteur franco-britannique Roman Griffin Davis (onze ans au moment du tournage) dont l’interprétation est criante de vérité et qui semble jouer sans effort et se jouer de la caméra jusqu’à être confondant de naturel. A ses côtés, Scarlett Johansson dans le rôle de sa maman, Taika Waititi dans celui d’Hitler (enfin comme ami imaginaire) et également Sam Rockwell dans le rôle d’un soldat nazi gay.
Il reste cependant un regret, celui de la langue anglaise du film. Etant donné le thème et le contexte, malgré la convention d’un langage "universel", c’est regrettable.