Signe(s) particulier(s) :
– troisième collaboration entre le cinéaste Olivier Assayas et l’actrice Juliette Binoche après "L’Heure d’Été" (2007) et "Sils Maria" (2014) ;
– Olivier Assayas a écrit une première monture du scénario au milieu des années 2000, sauf que personne n’en voulait, avant de le reprendre, de l’adapter et de le resynchroniser avec ses désirs, pour finalement tout recommencer à zéro.
Résumé : Alain, la quarantaine, dirige une célèbre maison d’édition, où son ami Léonard, écrivain bohème publie ses romans. La femme d’Alain, Séléna, est la star d’une série télé populaire et Valérie, compagne de Leonard, assiste vaillamment un homme politique. Bien qu’ils soient amis de longue date, Alain s’apprête à refuser le nouveau manuscrit de Léonard… Les relations entre les deux couples, plus entrelacées qu’il n’y paraît, vont se compliquer.
La critique de Julien
Cette semaine-ci dans nos salles, Olivier Assayas nous dévoile son nouveau film après "Personnal Shoper" (2016), récompensé à l’époque du Prix de la mise en scène à Cannes. Mais l’actrice Kristen Stewart, présente au casting de ses deux derniers films, ne fait plus partie de la distribution de ce film. Et pour cause, "Doubles Vies" raconte les pérégrinations existentielles de deux couples d’amis parisiens, dans un monde qui évolue, ainsi que leurs histoires sentimentales conjugales, et extra-conjugales...
Écrit par Olivier Assayas après bien des essais et tournures, "Doubles Vies" a pour point d’ancrage la relation assez tumultueuse qui lie deux amis de longue date. Il y a tout d’abord le personnage d’Alain (Guillaume Canet), un éditeur en pleine remise en question, étant donné la montée en puissance dans notre société de l’ère numérique, et Léonard (Vincent Macaigne), un écrivain bohème, lequel a toujours été édité par Alain. Sauf que ce dernier doute de plus en plus de l’écriture de Léonard, lequel consacre ses écrits à ses histoires amoureux, mais de manière soi-disant déguisée. Il y a aussi la femme d’Alain, Séléna (Juliette Binoche) star malgré elle d’une série télé populaire, qui prend la défense de Léonard et appuie la publication de son livre par son mari, et enfin Valérie, la compagne de Leonard, qui assiste vaillamment un homme politique, au contraire de petit copain, dont elle a tendance à minimiser l’importance. Sauf que tout ce beau monde est tout sauf fidèle, ce qui ne va pas aider les choses...
Extrêmement bavard, et sur un ton de bobos parisiens, "Doubles Vies" est un film assommant. Les compères infidèles ne cessent alors de blatérer entre eux (parfois à l’aide d’autres intervenants) pendant de trop longues minutes sur leur petite personne, et leurs états d’âme. Et c’est d’autant plus insupportable qu’ils le font avec un vocabulaire exquis, en maniant l’art de la rhétorique. En citant souvent le cinéma de Woody Allen, l’écriture du film n’a ainsi que pour seul moteur de longues discutions, rythmées par la spontanéité des acteurs, face à l’intelligence de leur personnage. Pas de répétitions donc, pour plus d’authenticité, et dynamisme.
Malheureusement, la tonalité de comédie n’est pas atteinte, étant donné que les dialogues manquent de réponses, d’autant plus que les personnages se mentent à l’un et l’autre, et sans véritables confrontations, qui pourraient ainsi mettre le feu aux poudres, et apporter un peu de piment à ces histoires. Et ce ne sont pas les quelques égratignures envers le monde de l’édition parisienne qui vont nous faire palpiter, d’autant plus que cela nous passe par-dessus de la tête.
Aussi, le manque de diversité du cadre spatial narratif ne permet pas d’appuyer une quelconque vivacité à ces ébats finalement peu réflexifs, et davantage nombrilistes.
Dans "Doubles Vies", chaque personnage amène à sa propre interrogation face à l’avenir incertain du monde actuel qu’il connaît, et dans lequel il vit, et exerce son métier. En essayant par exemple de nous faire réfléchir sur l’avenir du monde de l’édition, tout en ciblant toutes les nouvelles formes de publications qu’il existe, et avec analyse, Olivier Assayas détourne nos regards pour des intellectuels parisiens, par lesquels il tente une sorte d’auto-critique, avec dérision, mais bien trop sérieuse et ennuyeuse pour convaincre.