Synopsis : La liaison extraconjugale d’un Palestinien et d’une Israélienne à Jérusalem prend une dangereuse dimension politique lorsque ceux-ci sont repérés au mauvais endroit au mauvais moment, les mettant face à bien plus que leurs mariages ratés.
Acteurs : Maisa Abd Elhadi, Kamel El Basha, Ishai Golan, Mohammad Eid.
Ce film palestinien est le deuxième long-métrage de Muayad Alayan dont le scénario a été écrit par son frère Rami Musa Alayan. Le réalisateur enseigne le cinéma et la cinématographie à l’Université Dar Al Kalima. Il est co-fondateur d’un collectif d’artistes audiovisuels (Palciné). Son film avait déjà été projeté début juin dans le cadre de "Palestine With Love" et avait été suivi d’une discussion avec le réalisateur via Skype, modérée par Frank Barat (que nous avions reçu dans nos studios en juin 2014, à propos de son livre d’entretiens avec Ken Loach). Ce long-métrage (127’) a, notamment, reçu le Prix spécial du jury à l’International Film Festival de Rotterdam 2018, ainsi que le Prix du public du Hubert Bals Fund.
Si le film est une fiction, il s’annonce cependant comme adaptant une histoire vraie. Dans un pays et une ville où se confrontent depuis des décennies deux peuples et deux cultures, objets d’enjeux internationaux qui font perdre de vue la détresse de très nombreux Palestiniens, même si l’on n’oublie pas des faits passés de terrorisme qui ont fait l’actualité des médias. Ici, l’intime d’un homme et d’une femme offre un point de tangence avec l’extime de leurs pays (un pays qui revendique d’être le seul à occuper une terre de droit divin et ne prétend pas accorder le sol et la nation à des hommes et des femmes qui ont été chassés de leurs terres et maisons et le sont encore aujourd’hui). Ces déchirures sont là, comme elles le sont dans leurs couples respectifs.
Au hasard d’événements liés à la fois à la relation adultérine qu’il faut cacher et aux petits arrangements familiaux pour faire un peu de contrebande, les couples "officiels" seront concernés au premier plan, d’une part, et, ensuite, les responsables "politiques" des deux nations. Les services secrets palestiniens, par le biais d’un rapport rédigé par Saleem (Adib Safadi) pour cacher l’infamie de son adultère et l’armée d’occupation israélienne, puisque David, le mari (Ishai Golan) y occupe un poste important. Les conséquences en seront catastrophiques et chacun des éléments qui amène la situation à s’empirer pourrait faire penser que l’on en fait trop, ce qui semble bien ne pas être le cas.
Mettant en scène des acteurs palestiniens et israéliens, mêlant la vie politique et la vie intime, apportant le regard de plusieurs femmes, dont les épouses (dont l’une est enceinte) et une avocate défenderesse des droits de l’homme, The Reports on Sarah and Saleem jette un regard cruel sur le déséquilibre des forces en présence. Certains sont quasiment sans pouvoir (les Palestiniens) tandis que d’autres ont tout pouvoir : un pouvoir violent, injuste, immoral fondé à la fois sur la peur, sur l’image de ceux qui sont considérés comme ennemis alors qu’ils devraient être frères. A ce sujet, une phrase prononcée durant le film, pour banale qu’elle soit, est exemplaire. Au cours d’une intervention policière ou militaire, quelqu’un demande "Est-il arabe ou israélien ?" et la réponse : "Nous ne savons pas, il n’a pas de papiers sur lui".
Si ce film n’est pas exempt de défauts car il est parfois théâtral, et les mouvements de caméra (à l’épaule ?) donnent la nausée à certains moments (notamment dans les plans filmés en voiture), il a le mérite d’offrir un regard sur ce conflit dans la mesure où la dimension "politique" de la situation a une influence majeure sur la vie personnelle des individus.
Enfin, il nous faut relever ici un sous-titrage dont l’orthographe (usage, grammaire et sens) laissait à désirer. Le problème a été signalé au distributeur qui devrait faire en sorte que ce soit corrigé pour la sortie publique.