Synopsis : L’histoire fascinante de la mission de la NASA d’envoyer un homme sur la lune, centrée sur Neil Armstrong et les années 1961-1969. Inspiré du livre de James R. Hansen, le film explore les sacrifices et coûts – d’Armstrong et de la nation – d’une des plus dangereuses missions de l’Histoire.
Acteurs : Ryan Gosling, Claire Foy, Jason Clarke, Kyle Chandler, Pablo Schreiber, Corey Stoll, Ciarán Hinds, Shea Whigham, Ethan Embry, Christopher Abbott, Patrick Fugit
Après deux films qui ont marqué les esprits, les yeux et les oreilles (Wiplash et La La Land), Damien Chazelle change de cap et de pays avec son quatrième long métrage (son premier, en 1999, s’intitulait Guy and Madeline on a Park Bench, film musical, déjà, en noir et blanc). Le jeune réalisateur trentenaire passe du Canada aux terres américaines pour se consacrer à un homme qui est allé très loin et très haut dans le ciel, un homme, le premier, Neil Amstrong qui fit ses et les premiers pas sur la Lune le 21 juillet 1969, durant près de deux heures trente-deux ! C’était la mission Apollo 11.
Gageons qu’après les deux films musicaux de Chazelle, la barre était fixée très haut. Le ton et le style sont ici fort différents et les fans des deux derniers long métrages seront peut-être surpris, d’autres déçus. C’est que, tout comme son compatriote Denis Villeneuve, en 2016 avec Arrival (Premier Contact), le réalisateur ne fait pas dans le spectaculaire, pour se consacrer lui aussi sur l’humain, ici l’homme, l’humain. Voici l’Homme que nous présente Chazelle. Celuici adapte la biographie dite "autorisée" de Neil Amstrong. James R. Hansen est l’auteur d’ouvrages consacrés à l’histoire de l’aérospatiale. Amstrong lui a consacré cinquante heures d’interviews, et lui a donné un "accès privilégié aux documents privés et aux récits familiaux, et de plusieurs années de recherche". Hansen livre ainsi "un témoignage complet de la vie publique, privée et secrète de l’astronaute qui a changé à jamais le cours de l’Histoire".
Le film commence certes par un vol éprouvant du pilote (civil !) Armstrong au cours duquel il commet (ou pas) une erreur qui lui serait préjudiciable mais il se poursuit et se consacre essentiellement à la relation familiale, son couple, mais surtout la perte tragique de leur fille. Ce décès fera d’Armstrong un être blessé, torturé, replié sur lui-même et lorsqu’il sera approché pour les programmes Gemini (puis Apollo) la crainte est que ce deuil ne puisse affecter celui que l’on recrute.
Le film, d’une durée de près de deux heures vingt se terminera par le vol d’Apollo 11 en juillet 1969. Les images "lunaires" sont très belles (nous avons vu le film en IMAX) à tel point que, par boutade, certains d’entre nous dirent qu’il s’agissait de celles de Stanley Kubrick, filmant un faux alunissage ! Ce sera ensuite le retour sur Terre, la quarantaine et la rencontre mutique de l’astronaute avec son épouse, séparés par une paroi de verre !
Sur la Lune, un geste aura été remarqué par tous, un abandon - en quelque sorte - de ce qui l’attachait et le reliait encore à sa fille trop tôt disparue. Licence poétique, vérité historique ? Peu importe ne fait, même si beaucoup pourraient s’arrêter avec cette question, oubliant le profond témoignage d’humanité de ce film et de Neil Armstrong, à et pour celui-ci également. L’on retiendra longtemps les mots prononcés : « That’s one small step for [a] man, one giant leap for mankind » (un petit pas pour l’homme, un grand pas (ou un bond de géant) pour l’humanité). Chazelle ne s’y attarde pas même si ces mots furent longtemps étudiés sur le rôle du "a" entre crochets. L’important, il faut le rappeler, pour le réalisateur est cet-homme-là avec sa singulière humanité, dont la souffrance intérieure fut probablement un des moteurs de son engagement. Certains se diront qu’il était probablement déjà "mort" avec sa fille et qu’il n’aurait donc eu aucune crainte de perdre la vie. Impossible de le savoir.
Et cependant, Chazelle revient sur des moments grandioses mais également dramatiques de cette conquête spatiale, durant ces huit années couvertes par le film. En 1969, nous avions 17 ans, un an après mai 68. Mais plus tôt il est un drame dont ne nous souvenions pas. C’était un essai pour la mission Apollo 1 qui succède an programme Gemini (1963-1966), le 27 janvier 1967 à cap Canaveral sur le LC 34 lors d’ une simulation de routine dans l’après midi. La NASA a le projet d’envoyer fin février sa première cabine Apollo habitée. Trois astronautes vont la piloter, Virgil Gus Grisson qui a déjà volé sur Gemini 3, Edward White, le premier américain a être sorti dans l’espace sur Gemini 4 et, enfin, un novice Roger Chaffee. Les trois hommes prennent place dans le module de commande et commencent les tests quand le feu se déclare dans le module. Les trois hommes ne peuvent sortir de la cabine et meurent brûlés sans pouvoir être sauvés. Un problème lié au câblage électrique et une défaillance dans un milieu rempli d’oxygène.
Outre ce dramatique incident l’on découvrira que le matériel utilisé fait plutôt penser à du bricolage et de la quincaillerie d’amateurs qu’aux matériaux modernes et sophistiqués que nous connaissons aujourd’hui. Cette également cette conquête qui est présente en fil rouge derrière ou devant ce "First Man". L’on conclura sur le casting sans faille avec une mention particulière pour Ryan Gosling qui est bien celui qu’il fallait pour ce rôle-là. Il incarne véritablement cet homme torturé et mutique qui ne peut laisser percer ses sentiments qu’à de rares occasions, jusqu’au lâcher prise sur une terre étrangère !