Synopsis : Non loin de Tombouctou tombée sous le joug des extrémistes religieux, Kidane mène une vie simple et paisible dans les dunes, entouré de sa femme Satima, sa fille Toya et de Issan, son petit berger âgé de 12 ans. En ville, les habitants subissent, impuissants, le régime de terreur des djihadistes qui ont pris en otage leur foi. Fini la musique et les rires, les cigarettes et même le football… Les femmes sont devenues des ombres qui tentent de résister avec dignité. Des tribunaux improvisés rendent chaque jour leurs sentences absurdes et tragiques. Kidane et les siens semblent un temps épargnés par le chaos de Tombouctou. Mais leur destin bascule le jour où Kidane tue accidentellement Amadou le pêcheur qui s’en est pris à GPS, sa vache préférée. Il doit alors faire face aux nouvelles lois de ces occupants venus d’ailleurs...
Acteurs : Ibrahim Ahmed, Abel Jafri, Toulou Kiki, Fatoumata Diawara, Hichem Yacoubi.
Un film impressionnant, presque documentaire, tiré d’un fait réel, qui nous fait découvrir une réalité dont nous avons connaissance et que nous occultons bien souvent. Quand des "barbus" font la loi et interdisent au nom de l’Islam !
Le cinéaste s’appuie sur de belles images, d’humains dans la (et de) nature, pour montrer l’irruption insidieuse du contrôle religieux sur un village. Il montre également l’ambiguité et le manque de maturité de ces jihadistes : leur pouvoir est à la fois lié à une conception étriquée de règles qu’ils ne comprennent pas et ne respectent pas toujours pour eux-mêmes.
Ce regard africain apporte un nouveau souffle sur le cinéma que nous regardons avec nos yeux européens (teintés d’"américanisme" parfois !). Le danger serait de nous dédouaner et de voir en "ceux-là" les "barbares" !
Le film ouvre de nouveaux horizons éthiques (probablement non voulus par le réalisateur) parce que la "simplicité" de la vie de ces villageois nous renvoie à la "complexité" de notre propre civilisation et sa barbarie : je songe au rapport à la nature, que nous avons totalement obvié !
Et, les diktats religieux de ces jihadistes sont-ils fondamentalement différents de ceux de notre culture occidentale et de notre société consumériste où la mort de l’individu est sans cesse présente au profit d’une culture de masse abrutissante (même si, en principe, elle ne met pas à mort, du moins le corps) ?
Le pouvoir de ces jihadistes interpelle nos propres pouvoirs, notre interventionnisme qui fait que de fragiles équilibres sont rompus et mènent à de plus grandes instabilités encore.
Et pour conclure au plan religieux : nous-mêmes, comme civilisation chrétienne, sommes passés par là. En serions-nous sortis ? Quand je vois les réactions en France contre le mariage pour tous, je me suis senti au mieux mal à l’aise, au pis honteux d’être catholique !!!
En tout cas, si d’aventure cela pouvait se concrétiser - et même en dehors de toute promotion - il serait intéressant que nous puissions faire sur notre radio un débat avec des protagonistes du film (en dehors même de mon émission) en y consacrant une demi-heure voire une heure ! Utopie peut-être ?
Vous pouvez aussi lire cet article consacré au film dans Libération.