Synopsis : 1972. La championne de tennis Billie Jean King remporte trois titres du Grand Chelem. Mais loin de se satisfaire de son palmarès, elle s’engage dans un combat pour que les femmes soient aussi respectées que les hommes sur les courts de tennis. C’est alors que l’ancien numéro un mondial Bobby Riggs, profondément misogyne et provocateur, met Billie Jean au défi de l’affronter en match simple…
Acteurs : Emma Stone, Elisabeth Shue, Steve Carell, Andrea Riseborough, Jessica McNamee, Chris Parnell, Sarah Silverman, Alan Cumming.
En 2012, six ans après le road movie Little Miss Sunshine, les époux Jonathan Dayton et Valerie Faris nous avaient proposé Ruby Sparks (Elle s’appelle Ruby). Un film intéressant qui n’égalait pas le précédent. C’était un conte romantique, bien interprété par Paul Dano et Zoe Kazan (la scénariste et qui partage également sa vie avec Paul dans la vie "réelle") et qui invitait à réfléchir sur la relation avec son conjoint et les dangers de vouloir qu’elle (il) soit ce que l’on désire !
Une histoire vraie (encore aujourd’hui)
Avec Battle of the Sexes, ils s’attaquent à une "histoire vraie" qui s’est déroulée dans le milieu du tennis, notamment féminin. Le hasard des programmations fait que le film sort le même jour en Belgique que Borg/McEnroe (ce n’est pas le cas en France). Il s’agit ici d’un autre "match du siècle", celui qui a opposé en 1973 Billie Jean King et Bobby Riggs. Ne vous attendez pas à 2 heures de tennis car le film n’y consacre que ses quinze dernières minutes. Le film est construit sur deux axes le premier s’attache aux revendications des joueuses de tennis d’avoir une égalité de primes avec leurs homologues masculins. Une revendication "féministe" qui semble dater fameusement alors qu’il n’en est rien. Cette égalité n’est pas encore acquise dans le milieu du travail. Elle ne l’est pas non plus en matière de sport. Pour anecdotique qu’elle soit, la polémique autour de la différence de primes entre les vainqueurs homme et femme est significative du fait que rien n’a vraiment changé.
La machisme ordinaire
Les revendications des joueuses de tennis vont conduire Billie Jean King a créer sa propre association en 1973, la Women’s Tennis Association (WTA) (elle en sera la première présidente). Le film rend bien compte d’un machisme ordinaire pour qui la place des femmes est à la cuisine et au lit. C’est ce machisme qui a conduit au silence coupable sur les nombreux abus contre des femmes dont la presse et les médias sociaux se font l’écho, pour le meilleur et pour le pire [1] nous parait intéressante) depuis l’affaire Harvey Weinstein. Cet axe du biopic est bien développé et les différents protagonistes rendent bien compte de cette ambiance, au risque parfois de la caricature selon certains. Il n’empêche, qui n’a pas entendu aujourd’hui des mots analogues à ceux prononcés il y a quarante-cinq ans dans le film ?
Etre lesbienne dans un monde hétéronormé !
Le deuxième est consacré à la dimension LGBT. Mariée à l’avocat Larry King, de 1965 à 1987, elle aura une liaison avec son assistante, Marilyn Barnett (sa coiffeuse dans le film) qui la mènera à être la première sportive à faire son coming out. A l’époque dont il est question dans le film, celle qui militera pour et défendra les droits des personnes LGBT n’en fait pas encore un combat. Le spectateur découvre la relation et ses répercussions sur elle-même et son entourage. Ted son couturier (l’écossais Alan Cumming, lui-même militant LGBT) lui dira qu’il y a un temps où il faut se taire et se cacher et laisse entendre que ce ne sera pas toujours ainsi. Bien plus tard, en 2009, Barack Obama lui remettra la médaille présidentielle de la Liberté[en] pour son combat en faveur des femmes et des homosexuels.
Il est difficile de reprocher quoi que ce soit à ce film (qui n’est cependant pas du même niveau que Little Miss Sunshine) qui est une belle histoire (de revanche), un feel good movie qui manque probablement un peu d’aspérité et d’âpreté. Steve Carell se donne à fond dans son rôle de macho jusqu’au bout des ongles et l’on suppose qu’il a dû prendre beaucoup de plaisir à habiter le rôle d’un personnage complètement déjanté et farfelu. Emma Stone est quasiment méconnaissable, laissant libre place à la personnalité de Billie Jean King pour déployer son jeu, ses amours, ses combats. La partie musicale nous a paru trop présente ; elle accentuait trop les moments qui indiquaient au spectateur qu’il pouvait laisser place à l’émotion. Elle devrait cependant plaire à ceux qui aiment et/ou sont nostalgiques de la musique du début des seventies.
Pour conclure, nous sommes plus proche de la relative déception de Thibaut Grégoire sur Camera Obscura.