Synopsis : Le pistolero Roland de Gilead est lancé sur les traces de l’homme en noir, première étape dans sa quête de la mythique Tour sombre, lieu servant de point de connexion entre tous les univers qui lui permettrait de sauver son monde sur le point de s’écrouler.
Acteurs : Idris Elba, Matthew McConaughey, Katheryn Winnick, Jackie Earle Haley, Abbey Lee, Alex McGregor
Le réalisateur danois Nikolaj Arcel s’attaque à un monument de la littérature, The Dark Tower de Stephen King (1991-2012), avec un film homonyme d’une durée de moins d’une heure trente. L’essai est à moitié réussi ou à moitié raté (si l’on veut voir le verre à moitié plein/vide !). Non pas que cela soit mauvais. On ne s’ennuie pas durant ce film qui mêle des univers de fantastique et de western, voire d’heroic fantasy où le rêve et la réalité se rejoignent et où des passages entre plusieurs mondes existent. Le spectateur se rend très vite compte que le jeune Jake Chambers (Tom Taylor) sera le héros de l’histoire, ravissant presque la vedette au héros, Roland de Gilead, le pistolero (Idris Elba) et à l’antagoniste, l’homme en noir (Matthew McConaughey). Cet acteur est fascinant sans son rôle de ce que l’on pourrait appeler sorcier, tout puissant, sauf face au dernier des pistoleros. Fascinant même si, à certains moments, l’acteur fait du « Matthew McConaughey ». Jake rêve de quelque chose qui existe dans une autre "réalité" et qu’il va dessiner [1]. L’enjeu est la Tour sombre, censée maintenir la cohésion de plusieurs univers et que ceux qui sont liés à l’homme en noir veulent détruire pour permettre aux forces du mal d’envahir ces univers après la destruction de la Tour qui pourra se faire grâce à la puissance mentale d’enfants purs. Chaque attaque contre la tour a des répercussions dans les différents mondes, y compris celui auquel appartient Jake (le "notre" donc). Elles se manifestent pas des tremblements de terre, des destructions, etc. (thème abordé autrement dans la série Fringe). On se doute bien que le pur parmi les pur sera Jake et que tout l’enjeu consistera à le capturer. On ne précisera pas grand-chose d’autre de l’intrigue, au risque de spoiler, d’autant que nombre d’éléments de celle-ci sont (très) prévisibles.
Il y a toutefois un problème lié à la durée du film, bien trop court pour que l’on puisse appréhender l’univers dont on sait très peu de choses de même que des différents intervenants. Le film aurait mérité une introduction et une présentation qui permettent de mettre le spectateur en situation. C’est que cela ressemble à du « Seigneur des anneaux » et que le film devait se donner du temps, deux heures au moins et trois n’auraient pas été de trop. On se dira qu’il y a – en principe – deux suites prévues et même une série qui devrait s’intercaler entre. Certes, mais il en est de même de la trilogie des Anneaux (qui a même eu droit à des versions longues).
Une autre difficulté est liée à la transposition du cycle romanesque de Stephen King qui prend huit romans pour raconter sa saga. Occasion peut-être de vous mettre à la lecture des quatre mille pages écrites par l’auteur, ou à défaut, de consulter Wikipedia – par exemple – pour en savoir plus. Où se situe-t-on dans l’univers ? Ceux qui n’en ont rien lu seront en manque d’informations et ne prendront alors le film que comme une énième saga fantastique qui navigue entre plusieurs mondes en jouant aussi sur le décalage ou l’anachronisme. Les connaisseurs de l’œuvre romanesque risquent d’être déçus par une adaptation qui leur paraitra insuffisante voire une trahison pure et simple. N’ayant pas lu cette œuvre de King, nous ne pouvons qu’attendre le retour de ses (ces) fans.
Il y a aussi une difficulté avec le personnage de Jake Chambers qui a onze ans dans le roman (et qui meurt dans celui-ci). Il est interprété par Tom Taylor (qui avait joué notamment dans la minisérie britannique Doctor Foster). Tom a quinze ans au moment du tournage (voire seize puisqu’il est né en 2000 ou en 2001 selon Wikipedia !). Il arrive encore à faire illusion, car il a des traits très juvéniles. Mais à son âge, les transformations viendront très vite : comment va-t-on gérer « Jake Chambers » sans trahir plus encore l’histoire (biographie fictive) ?
Le film nous a donc laissé entre deux mondes, avec un énorme goût de trop peu et le risque de passer pour un petit film divertissant sans plus. Au passage, le spectateur constatera que le pistolero utilise non un pistolet... mais un revolver, qu’il est ambidextre et recharge le barillet avec beaucoup d’efficacité et de rapidité.
Un film à voir avec plaisir, mais le sujet méritait un bien plus ample déploiement surtout pour un volet qui se veut inaugural.
Bande-annonce :