Synopsis :
À Boston, en 1926, malgré la Prohibition, l’alcool coule à flots dans les speakeasies. Joe, le plus jeune fils du commissaire adjoint Thomas Coughlin, est déterminé à se faire une place au sein de la pègre. Il tombe dans la criminalité en braquant le bar clandestin d’un caïd local. Pire encore, il séduit la maîtresse de ce caïd. La vengeance de ce dernier ne se fait pas attendre : Joe est emprisonné. Derrière les barreaux, il fait la connaissance d’un vieux parrain, Maso Pescatore, qui se charge de son « éducation ». La « carrière » de Joe va alors décoller...
Acteurs : Sienna Miller, Ben Affleck, Zoe Saldana, Elle Fanning, Scott Eastwood, Chris Sullivan, Brendan Gleeson.
Même si le film pouvait gagner à être plus court de quinze minutes (ou, a contrario, plus long pour développer certains thèmes et intrigues), c’est avec plaisir que nous retrouvons Ben Affleck à la réalisation. Mais également de l’autre côté de la caméra, comme acteur, ce que plusieurs confrères ont regretté de leur côté, estimant soit qu’il ne convenait pas pour le rôle, soit qu’à courir deux lièvres à la fois, il perdait les deux ! Ben Affleck adapte à nouveau un roman du prolifique Dennis Lehane. Si Affleck avait déjà adapté son Gone Baby Gone, on retiendra que l’on retrouve cet auteur derrière Quand vient la nuit, Shutter Island, Mystic River, mais également des séries comme Castle, mais surtout Boardwalk Empire et The Wire !
Live by Night débute par une évocation de la Première guerre mondiale à laquelle Thomas a participé. Le film se termine par des images d’Hitler et l’évocation d’une ...très peu probable guerre ! L’intrigue, quant à elle se focalise sur la fin des années 20 (de 27 à 30), sur deux lieux, Boston et Tampa (en Floride), sur deux "familles", deux mafias que tout oppose, les italiens et les irlandais, entre deux femmes, entre la loi et l’injustice, entre blancs pure souche et les autres...
S’il vit de petits braquages, Joe ne vise pas plus haut "Je ne veux pas être un gangster. Ça fait longtemps que j’ai arrêté de courber l’échine." Réflexion, typiquement américaine (que l’on retrouve d’ailleurs, semblable, dans la bouche de Deborah Lipstadt (Denial) : "Je suis américaine, je ne baisse pas la tête !") à laquelle Maso répondra : "Peu importe ce que tu veux. Tu as choisi cette vie." Et c’est bien là le hic pour notre "héros", comme le signale le réalisateur : "Joe reconnaît sans la moindre hésitation qu’il a choisi d’être un hors-la-loi dans une ville tenue par des gangsters où les mafias italienne et irlandaise se font la guerre (...) Ce qui me surprend beaucoup chez lui, c’est que tout en enfreignant la loi et en vivant selon ses propres règles, ce sont ses valeurs morales qui l’empêchent de se considérer comme un gangster".
Thomas Coughlin gère ce conflit personnel, mais qui le dépasse et prend des proportions bien plus vaste sur fond de Prohibition, mais également d’un racisme de plus en plus exacerbé (la montée du Ku Klux Klan) après le krach de 1929 et la grande dépression. C’est tout l’art de l’acteur/réalisateur de se mettre en scène sans emphase, en mode mineur, sombre, intérieur. Et plus que l’expression des sentiments par le visage ceux-ci, ainsi que ses réactions, s’exprimeront par le biais d’un narrateur omniscient, en l’occurrence, Thomas. Cette narration, cette voix off, a pour conséquence un effet (pervers pour certains) : nous savons que cette voix et donc ce "héros" survivra à la fin.
Durant toute la durée du film, de ses enjeux et conflits, le spectateur aura l’occasion de voir une très belle reconstitution des lieux et ambiances d’époque (le budget voitures a dû être élevé !), mais également les jeux troubles des uns (des unes parfois) et des autres. Il ne sera pas en reste avec une poursuite en voiture après un cambriolage et surtout une des dernières scènes où l’on dézingue depuis les caves jusqu’au grenier. C’est totalement inattendu... quoiqu’au détour d’une phrase et d’un tonneau de rhum, une des clés nous sera donnée. La vraie fin du film, elle, sera cruelle et l’on pourrait jouer sur ce "elle", car si l’amour soulève des montagnes il obscurcit aussi le jugement. Et Thomas qui va passer de la passion à la compassion sera probablement celui qui sera surpris par un rire qui lui renverra au visage toute sa naïveté première !
Si donc, il se trouvera bien quelques confrères qui ne seront pas en phase avec cet enthousiasme. N’hésitez pas à les lire et à les écouter... mais faites aussi un détour par la critique de Patrice Steibel, un des rédacteurs du blog Les chroniques de cliffhanger.
Bande-annonce :