Synopsis : Le film raconte l’assassinat de John F. Kennedy et les quatre jours de deuil national du point de vue de Jackie Kennedy. Une période pendant laquelle le monde entier avait le regard fixé sur la célèbre veuve. Une femme en deuil qui essaie de rassurer la nation en choc et qui déterminera à tout jamais l’image que nous avons de son mari.
Acteurs : Natalie Portman, Peter Sarsgaard, Billy Crudup, John Hurt, Greta Gerwig, John Carroll Lynch, Richard E. Grant, Beth Grant, Max Casella.
Ce dernier film de Pablo Larraín est une heureuse surprise, tant sur le plan cinématographique, qu’historique sans compter sur l’effet mémoire et nostalgie. Le réalisateur chilien se fait l’écho de cinq jours qui ont bouleversé le monde, depuis le 22 novembre 1963 (jour de l’assassinat du Président Kennedy) jusqu’au 25 novembre, jour des funérailles. Bien loin des biopics mélodramatiques et en format scope du cinéma hollywoodien Jackie nous offre un regard empli de tendresse et d’émotion sur une femme, l’épouse, ou plutôt la veuve du Président assassiné. Une mort qui questionne encore aujourd’hui à tel point que même une série télévisée, 22.11.63 ’joue’ de ce thème : "et si l’on pouvait revenir en arrière !".
Ne vous fiez pas au diaporama ci-dessous pour vous faire une idée de l’image et de l’ambiance du film. Ces photos sont prises en format numérique avec un Canon 5D Mark III, un appareil de haut niveau... mais elles ne rendent pas justice au film, tourné au format... 16 mm. Outre que les amateurs de "vraie pellicule" auront du grain pour leur argent(ique !) cela permet une ambiance d’époque, d’une part, et d’inclure quelques images d’archive sans que l’on ne voie trop la différence à l’écran. Les passerelles entre images réelles et ’fiction’ (ou plutôt exercice de relecture et de reconstruction d’un récit et d’une vie) se font ainsi avec réalisme et douceur. L’on peut se croire revenu à ce moment de l’Histoire.
L’histoire est connue et donc sans surprise. Le réalisateur ne fait pas dans la reconstitution gore, ce qu’un certain cinéma américain aurait pu faire. Certes, il y a bien quelques plans qui rendent visible cette citation extraite du rapport Warren : "Une balle traversa le cou du Président et une autre, mortelle, fit voler en éclats le côté droit de son crâne… " mais c’est un tout autre regard qu’offre Pablo Larraín. Non pas tant sur Jackie que sur son époux, via celui de sa veuve (brillamment interprétée par Natalie Portman) et en particulier via ses conversations avec un journaliste (Il s’agit de Theodore H. White (EN) dont le nom n’est pas précisé durant le film) interprété par Billy Crudup. D’autres conversations et échanges nous seront donnés à voir et entendre. Ainsi avec son beau-frère Robert (Peter Sarsgaard), son amie et secrétaire sociale de la Maison-Blanche, Nancy Tuckerman (Greta Gerwig), le révérend Father Richard McSorley ’EN), SJ (ami des Kennedy ; n’oublions pas que Kennedy est à ce jour le seul président catholique de l’histoire des USA). C’est John Hurt qui joue le rôle de ce jésuite. Ce sont aussi les échanges entre deux "clans", celui des Kennedy et celui des Jonhson (Lady Bird Johnson, jouée par Beth Grant et Lyndon, interprété par John Carroll Lynch).
Le film ne se présente pas linéaire dans l’ordre chronologique, mais offre des aller/retour entre ces différentes journées. La perception des événements se modifie au gré des conversations, mais aussi du protocole lié aux funérailles. Que peut-on faire ou pas au risque du danger pour la famille et les invités prestigieux. Mais aussi que peut-on écrire de ce Président fauché dans la force de l’âge, de ses rêves, de ceux qu’il n’a pu réaliser ? Entre dit et non-dit, Jackie va devoir naviguer. Confier, se rétracter, affirmer et nier tout à la fois. Et la dimension mondiale de son époux croise une autre dimension, celle de son intime qu’elle va exprimer à travers une des chansons de la comédie musicale Camelot d’Alan Jay Lerner et de Frederick Loewe, inspirée de la légende arthurienne et créée à Broadway en 1960. Bob est le Camelot de Jackie ! Il ne s’agit pas ici d’un éloge funèbre ‑ ’Jackie’ et le réalisateur évoquent, en creux, certaines zones d’ombre de Kennedy ‑ mais de mettre en relief ce que l’Histoire pourra retenir de cet homme.
Jackie est un film "brillant" parce que, justement, il n’a pas ce côté tape à l’oeil. Ce n’est pas une majestueuse reconstitution avec force de moyens techniques. C’est un film en pudeur, en émotion, en retenue qui nous offre un regard sur un homme qui, malgré ses défauts, et grâce à ses qualités, a eu l’ambition de révolutionner le monde. Natalie Portman a obtenu le prix de la meilleure actrice lors du Festival du film de Hollywood de 2016. Elle mérite plus encore, mais cette année, la concurrence est très rude !
Bande-annonce :