Synopsis : Raymond et Raymond s’aiment. Quand le cancer s’empare de l’un d’eux, déjà séropositif depuis 27 ans, leur combat devient commun. Témoignant leur amour à leurs amis, ils tentent de renaître à une vie nouvelle, mais forcément inconnue. Leur cheminement nous entraîne dans un étonnant voyage sentimental.
"Fidèles à leur ligne directrice, Nathalie Rossetti et Turi Finocchiaro (Chœurs en exil) mettent en image l’amour et l’amitié qui résonnent face à la mort. Le témoignage vivant de deux êtres qui s’aiment au-delà de la maladie."
Canto alla vita sera donc projeté en avant-première à Flagey dans le cadre de la Journée mondiale de lutte contre le sida (pas encore à l’agenda du site) et le 3 novembre, au Botanique - dans le cadre du Festival Cinéma méditerranéen de Bruxelles.
Archives et animation au service d’un récit de vie
Ce documentaire traite d’une mort annoncée, comme d’autres films, quoique de façon différente. Ainsi Sylvain Biegeleisen qui filmait les derniers mois de sa maman dans Twilight of a Life (Au crépuscule d’une vie) ou Manu Bonmariage qui accompagnait des malades qui demandaient l’euthanasie (sans toujours l’obtenir) dans Vivre sa mort. On ne peut que se taire et regarder ce film, profondément humain et empli d’une joie étonnante malgré la mort annoncée et à vivre, par le malade et par son entourage. La particularité du film est de faire appel à des images d’archives d’une part, et à des séquences en animation, d’autre part. Les archives remontent à environ vingt-cinq ans, à l’époque où Raymond avait contracté le virus du sida et où la télévision lui consacrait un reportage. L’animation est due au dessin de Nicolas Liguori. Images très douces, presque noir et blanc, qui viennent ponctuer le récit, le pondérer, l’éclairer ou l’adoucir. Intéressante contribution dans un documentaire qui ajoute un surcroît de sens grâce à la fiction du dessin pour rendre compte du dessein et du destin d’un homme et d’un couple. Le réalisateur les accompagne, Raymond et Raymond, leurs amis, seuls, ensemble, avant, après, au crématorium, à la montagne, en téléphérique (images réelles et dessinées récurrentes, comme s’il fallait grimper vers les cimes, prendre de la hauteur, redescendre aussi et surtout transiter d’un point à l’autre.
Du réel de la mise en scène à la conscience de la caméra
Un documentaire que l’on ne peut que recommander même si il est inévitable qu’il y a un travail de "réalisation" nécessaire et indispensable et donc de "mise en scène", même pour un "documentaire". A la fois du récit, de l’image parce qu’il faut construire une histoire qui porte sens. Il y a aussi ce que nous écrivions déjà à propos de Vivre sa mort et que nous adaptons dans les lignes qui suivent. Il y a un problème lié au tournage de tels documentaires. Outre qu’il faut préparer le film, prévoir une mise en scène sans storyboard et tout en connaissant la fin - propre à notre humanité - ne sachant quand le mot "fin" s’inscrirait dans le chair de Raymond qui a donne corps, non pas à la science ou à la médecine, mais au cinéma, à nous spectateurs. Il y a donc une double facette inévitable dans ce documentaire : il est à la fois exhibitionniste et voyeuriste. On donne à voir. Un corps qui va être marqué par le cancer et mourir va devoir être montré, exhibé - à corps défendant - dans la déchéance qui approche, inéluctable. Mais cela implique aussi que les divers intervenants, protagonistes "jouent" d’une certaine façon un "jeu" - inévitable - devant la caméra. Les mots, la gestuelle, les expressions portent toujours le risque d’un excédent, d’un trop (plein), exprimé, même involontairement, par ceux que la caméra observe pour nous, spectateurs qui - sans être voyeur (cf. Peeping Tom de Michael Powell) - assistons à ce qui devrait être de l’ordre de l’intime, de l’intimité.
Ceux qui souhaitent en savoir plus sur le film, l’équipe, les protagonistes et les intentions du réalisateur peuvent consulter ce dossier.