Synopsis : Un virus inconnu se répand en Corée du Sud, l’état d’urgence est décrété.
Les passagers du train KTX se livrent à une lutte sans merci afin de survivre jusqu’à Busan, l’unique ville où ils seront en sécurité...
Acteurs : Yoo Gong, Dong-seok Ma, Woo-sik Choi, Yu-mi Jeong.
Des éloges qui précèdent un film...
Le film est sorti en France depuis le 27 août, mais il avait été précédé d’une projection au Festival de Cannes 2016 où il avait été reçu par une "standing ovation". Les forums de discussion bruissaient des éloges qui faisaient se retrouver dans un même enthousiasme les "purs cinéphiles" et les fans de cinéma de genre. Tout au plus, l’un ou l’autre écho négatif se faisait jour. Ainsi, cette réaction "Entouré d’un très bon écho critique, Dernier train pour Busan succède un mois plus tard dans les salles à The strangers, et laisse croire, par sa concomitance, à une effervescence du côté du cinéma de genre sud-coréen. Pourtant, l’opus de Sang-ho Yeon n’est ni une bombe ni un film qui invente l’eau chaude. Ses personnages et sa trame obéissent presque intégralement à des stéréotypes qui ne surprendront que les néophytes, quand l’utilisation des infectés/zombies tend au commentaire sociopolitique convenu, sinon lourdingue. Difficile donc d’être surpris ou dithyrambique à quelque moment que ce soit." résume assez bien l’avis de spectateurs dont le témoignage est dissonant par rapport aux éloges majoritaires (partagés par de nombreux confrères après la vision du film).
...précédé d’une préquelle... qui suivra !
Et il faut reconnaître que Busanhaeng en jette et en met plein la vue. C’est d’ailleurs plus un film zombie d’action qu’un long-métrage sud-coréen d’horreur. Ce film est la "suite" d’un film d’animation Seoulyeok (Seoul Station) qui n’a pas encore de date de sortie officielle. Il sera présenté à ce moment-là comme une préquelle de Busanhaeng. Pas de sortie officielle, même s’il a été projeté au BIFFF le 5 avril dernier, Festival qui le présentait ainsi avec son style si particulier : Bien décidé à retrouver sa fugueuse de fille, Suk-gyu dépense sans compter et multiplie les appels à l’aide. Un jour, l’une de ses sources lui annonce qu’il a retrouvé la gamine, mais – tiens-toi bien, papa – elle évoluerait dans le milieu sordide des plaisirs tarifés au centre de Séoul. Se faisant alors passer pour un client prêt à défriser de la chicorée, Suk-gyu est à deux doigts de mettre la main sur sa petiote quand du rififi se fait entendre du côté de la gare de Séoul. Squat bien connu de clochards souvent pétés comme des serre-joints, ce n’est généralement pas l’endroit où l’on traîne la nuit tombée, et encore moins ce soir-là : un sans-abri fraîchement décédé vient tout juste de revenir d’outre-tombe avec une fringale pas possible et se paie un collègue d’infortune en guise de souper. Très vite, l’épidémie cannibale se propage dans toutes les rues et le gouvernement, soucieux de préserver les beaux quartiers, décide de mettre en quarantaine ce bloc populaire en attendant tranquillement qu’ils aient fini leur grande bouffe…
Après The King of Pigs (nominé à la Caméra d’Or à Cannes) et The Fake (grosse sensation d’Annecy et vainqueur à Sitges), Yeon Sang-ho s’attaque cette fois à la lutte des classes, où l’esprit de Romero remplace celui de Marx. Fidèle à sa noirceur proverbiale, le nouveau génie de l’animation coréenne livre avec Seoul Station une œuvre à la fois percutante et éminemment politique."
Au sujet des liens entre les deux films, le réalisateur précise : Je préparais un film d’animation intitulé Seoulyeok, déjà une histoire de zombies, mais avec une ambiance beaucoup plus sombre et un message social beaucoup plus fort que dans Busanhaeng. Pendant la production de ce film d’animation, je me suis dit qu’en traitant le sujet de manière plus commerciale, tout en y apportant une touche personnelle, je pourrais peut-être en faire une version en prises de vues réelles."
Il est temps de prendre le train !
Les spectateurs avaient déjà embarqué dans un train à dimension "sociale", c’était Snowpiercer (Le transperceneige, de Joon-ho Bong (2013). Yeon Sang-ho va également utiliser un espace clos pour sa "suite" de Seoul Station. A l’image de Snowpiercer, il y a une utilisation de l’espace clos, du passage de wagon en wagon. Toutefois, on n’est pas enfermé dans le train, même si celui-ci constitue un personnage à part entière. Un personnage qui "meurt" d’ailleurs à l’image de nombreux protagonistes du film. C’est que le nombre de décès est important dans ce pays confronté à une curieuse épidémie qui transforme les humains en zombies. Le train pour Busan semble le seul moyen d’échapper à une "épidémie" dont on ne sait pas grand-chose. Seule la télévision donne des informations qui semblent tronquées ou biaisées par rapport à ce que les passagers du train voient à l’extérieur... et aussi les wagons. Ceux-ci transportent de nombreux passagers d’âges et de classes sociales différents. Et c’est un des éléments forts du film : nous faire découvrir la diversité de réactions humaines face à la difficulté. Plus qu’un film "anti-capitaliste" (certes, il l’est en partie) c’est surtout la critique du "chacun pour-soi" dont il est question ici : "Par rapport à mes films précédents, la dimension sociale est moins appuyée, mais toujours présente. J’ai voulu que le public coréen puisse retrouver au sein du genre fantastique - auquel il n’est pas forcément très habitué - des éléments de la vie quotidienne. J’ai imaginé des personnages dans lesquels les Coréens puissent se reconnaître, même si je pense que Dernier train pour Busan aborde finalement des thèmes et des sentiments universels" (Yeon Sang-ho, dans le dossier presse). Les courtiers en bourse, les financiers, les hommes d’affaires en prennent pour leur grade, mais bien plus encore la mesquinerie et la bassesse humaine s’ajoutant à un instinct de survie basique.
Des raisons de quitter le train en cours de route ?
Il faut reconnaître que le film semble bien satisfaire à son cahier des charges. Bourré d’action et d’adrénaline, bourré d’effets spéciaux, de cascades et avec une débauche de maquillages - cependant plus grotesques qu’horrifiques - et de cascadeurs. Les acteurs habitent bien leurs personnages, au risque, il est vrai, de la caricature. Il y a cependant quelques éléments qui peuvent apporter une certaine déception et qui ne permettent pas de partager l’engouement dont il est fait état en début de cet article. Et cela tient au principe de vraisemblance ou plutôt de cohérence. Il faut bien sûr faire abstraction de la préquelle que la majorité des spectateurs n’aura pas vue à ce jour. Prenons pour acquis qu’il y a bien une épidémie de zombies et laissons dans le vague ce terme avec de multiples sens possibles. Le début du film laisse entendre qu’il y aurait eu une fuite de gaz. Mais c’est peut-être une fausse information pour ne pas se poser de questions. On découvre la maladie en voyant un animal se "relever" quelques minutes après avoir été heurté par un véhicule. Les animaux peuvent donc être atteints par ce qui apparaît donc comme une infection virale. Déjà, une curiosité : on ne voit plus d’autres animaux atteints. Laissons-là, ce n’est pas l’objet du film. Celui-ci laisse entendre à un moment donné que cette épidémie serait liée à une responsabilité de la société de Sok-woo mais on n’en dit pas plus. Si pour la réaction au bruit et à la lumière, nous sommes dans les classiques, comme dans World War Z, en revanche,le gros hic c’est la façon dont le virus se transmet, à savoir par morsure d’une main ou d’un membre. Soit donc de salive à sang. Le virus entre dans le sang, arrive donc aux glandes salivaires et cela doit bien prendre quelques minutes. OK. Mais le sang gicle partout, mais ne contamine pas. Bizarre ! Bien plus, la morsure a dans certains cas une action instantanée et dans d’autres cas pas. Est-ce que les contaminés meurent et deviennent "zombies" ou bien peuvent-ils être zombies sans "mourir" ? Ces éléments semblent passer à la trappe par rapport au reste et cela déçoit.
Pour prolonger la réflexion et dépasser cette critique mitigée, n’hésitez pas à lire l’interview du réalisateur par Nicolas Gilson dans la foulée du Festival de Cannes sur le site ungrandmoment.be.