Synopsis : À trente-trois ans, Mathieu ne sait pas qui est son père. Un matin, un appel téléphonique lui apprend que celui-ci était canadien et qu’il vient de mourir. Découvrant aussi qu’il a deux frères, Mathieu décide d’aller à l’enterrement pour les rencontrer. Mais, à Montréal, personne n’a connaissance de son existence ni ne semble vouloir la connaître…
Acteurs : Gabriel Arcand, Pierre Deladonchamps, Catherine De Léan, Marie-Thérèse Fortin, Pierre-Yves Cardinal.
Un acteur de talent
Pierre Deladonchamps n’est plus un inconnu pour les cinéphiles qui l’auront découvert dans son premier rôle, celui de Franck dans L’inconnu du lac (Alain Guiraudie, 2013). Ce film qui a obtenu la Queer Palm au Festival de Cannes en 2013 a valu, l’année suivante, à l’acteur d’être nommé meilleur espoir masculin aux César ! Depuis, Pierre Deladonchamps a joué dans Une enfance (Philippe Claudel, 2015), et Eternité (Tran Anh Hung, 2016) qui sortira sur nos écrans à la fin de l’été. Il est difficile de traiter de ce film sans "spoiler" (à savoir dévoiler des éléments essentiels ou constitutifs de l’intrigue, par exemple, dans un policier, donner le nom de l’assassin). Aussi nous nous permettrons de jouer sur la notion d’inconnu. Jeu de mot totalement assumé et qui est même, tous comptes faits, un élément du film !
Aller vers l’inconnu !
A lire le synopsis du film, nous apprenons que c’est un inconnu qui se rend à Montréal. Difficile d’en dire plus de dévoiler des identités au risque de perdre toute la saveur de ce film dont une partie se déroule sur et autour d’un lac qui ne porte pas de nom. Un lac tout aussi inconnu donc que Mathieu. Qui est-il celui-là qui porte une double identité, qui n’est présenté que comme en relation avec, relation de, ou fils de ! "Fils de Jean" donc pour certains, mais présenté comme fils d’un ami à d’autres, qui sont eux aussi fils de Jean ! C’est un peu comme si l’identité de Mathieu ne pouvait se dire qu’à travers une autre, lui qui n’a pas de père ou plutôt dont le père n’est pas le père puisque celui qui s’est chargé de son éducation première n’était pas son géniteur. Celui-ci était inconnu et ce Mathieu, ne va être défini pour nous qu’en termes de filiation ! Son identité se réfère donc à un inconnu et un absent ! C’est qu’un coup de fil venu du Canada va mobiliser Mathieu. On veut seulement son adresse pour lui envoyer un colis... et lui, cherche, se met en quête et va apprendre que son père biologique était canadien et qu’il vient de mourir !
L’inconnu du lac !
Cet appel téléphonique, ce sera aussi l’appel du sang pour Mathieu. Il veut partir vers son origine et découvrir ses frères, ou plutôt ses demi-frères ! Mais il lui faut pour cela taire le but de sa visite, ainsi que lui demande avec insistance le médecin, confrère et ami de Jean. Le coeur du film va consister en cette tentative d’approche des frères, découverte de ce qui les relie, mais aussi les différencie, voire les oppose. Cette rencontre se fera autour d’un lac, celui-là où Jean a disparu. C’est que le corps du père est absent, il a disparu et l’un des fils voudrait le retrouver pour pouvoir exercer pour lui et sur lui les rites prévus par le judaïsme. Tout porte à croire que le corps est là, sous la surface tranquille du lac. Tout donne à penser que Mathieu est proche du corps de son père. Le chien de Jean n’a-t-il pas retrouvé sa casquette ? Mais cette quête du père va permettre d’approfondir l’identité de certains, mais en même temps de découvrir que ce père est un inconnu. C’est par bribes et conflits interposés que Mathieu découvre qui sont les fils de Jean à défaut de savoir qui il est et d’en savoir plus sur ses origines, sur son père !
Pierre, l’ami inconnu !
Pierre Lesage (Gabriel Arcand) va jouer le rôle de facilitateur, à son corps défendant, faiseur de liens, médecin proche de la nature, auscultant les coeurs et le corps pour permettre à Mathieu de donner un nom à son père, à dépasser l’absence du corps de Jean et aller au-delà de son besoin de mieux connaître les frères Ben (Pierre-Yves Cardinal, que nous avions découvert dans Tom à la ferme de Xavier Dolan, 2013 - là aussi, un rôle - difficile - de frère) et Sam (Patrick Hivon). Avant de rentrer à Paris, Mathieu en aura appris plus sur lui-même, sur Jean, sur ses fils, mais aussi sur Pierre et les siens. Il pourra aller, riche de nouvelles identités, à la rencontre de son propre fils, fils de Mathieu, lui-même fils d’un père qu’il portera dans son coeur !
Un inconnu à découvrir !
Le fils de Jean est un film que l’on ne saurait trop vous conseiller pour le jeu des acteurs (et en particulier, mais pas uniquement Pierre Deladonchamps), la tendresse et l’humanité qui se dégage du récit qui risque de vous laisser les yeux emplis de larmes à la sortie de la salle, malgré quelques faiblesses du scénario. Notons ainsi le fait que tout repose sur le fait que Mathieu se rend au Canada... mais sa démarche est liée à une curiosité totalement imprévue et imprévisible. Il y a aussi le rôle d’un tableau de valeur dont on ne sait trop qui l’a vraiment acheté et comment il arrive là où il est. Mais tout ceci est très second et même secondaire par rapport à un film touchant, bouleversant qui vous invite à franchir l’océan avec Mathieu pour aller vers l’inconnu du Québec ! Ce sera surtout un film qui invite à une deuxième vision. En effet, l’ayant vu et connaissant alors l’intrigue et l’inconnu du récit, le spectateur pourra se laisser emporter par ce drame.