Synopsis : Dans les années 30, Jesse Owens, jeune afro-américain issu du milieu populaire, se prépare à concourir aux Jeux d’été de 1936 à Berlin. Cependant, alors qu’Owens lutte dans sa vie personnelle contre le racisme ambiant, les Etats-Unis ne sont pas encore certains de participer à ces Jeux, organisés en Allemagne nazie. Le débat est vif entre le président du Comité Jeremiah Mahoney et le grand industriel Avery Brundage. Pourtant, la détermination de Jesse à se lancer dans la compétition est intacte...
Acteurs : Stephan James, Jason Sudeikis, Jeremy Irons, William Hurt, Carice van Houten, Eli Goree.
Race, c’est l’histoire d’une légende américaine, ou plutôt de deux années de la vie d’un sportif américain, noir. Celles-ci sont si typiquement américaines, entendons qu’elles correspondent à l’imaginaire du rêve américain (voire au rêve américain imaginaire !), que ce film apparaît par certains côtés un "feel good movie" (mais ne l’est cependant pas). En effet, à première vue, il peut donner l’impression d’être trop "cliché", convenu, formaté selon un certain idéal. Et pourtant c’est ce que l’on appelle une "histoire vraie" et si elle est peut-être un peu romancée, ce sera à peine un écart par rapport à la réalité historique. Certes, il s’agit d’un travail de reconstruction, d’une histoire, d’une vie, d’une légende, d’un combat, voire de plusieurs combats. Il y a donc un a priori au départ : rendre compte d’une histoire, et même d’une légende, au sens le plus noble et aussi le plus humain de l’expression. C’est l’histoire d’un sportif noir, Jesse Owens. Ceux qui ne connaissent pas celui qui a fait la nique à Hitler en remportant quatre médailles d’or aux JO de Berlin en 1936 peuvent consulter cette page Wikipedia ou les livres qui lui sont consacrés. On citera, par exemple Jesse : La fabuleuse histoire de Jesse Owens qui sortira en septembre 2016, à l’occasion de la sortie de Race.
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L’axe narratif principal du film, c’est donc l’histoire et la "légende" de Jesse Owens, quadruple vainqueur aux jeux Olympiques de 1936, à Berlin, devant Hitler. Il y a ensuite deux axes secondaires, mais essentiels. Tout d’abord la question du boycott des Jeux par les USA à cause de la politique d’Hitler, notamment vis-à-vis des Juifs. Nous découvrons ainsi les rôles de Jeremiah Mahoney (William Hurt), partisan du boycott, et de Avery Brundage (Jeremy Irons) qui y est opposé. Ensuite, c’est le combat d’un entraîneur blanc, Larry Snyder (Jason Sudeikis), pour accompagner Jesse Owens et en tirer le meilleur.
Nous avons enfin des axes narratifs tertiaires, mais qui n’en sont pas moins intéressants : la ségrégation raciale aux USA (sur fond aussi de sortie de la crise de 1929) d’une part et la politique tout aussi raciale d’Hitler et de ses sbires en la matière, d’autre part. Un dernier axe narratif concerne le parcours de Leni Riefenstahl (Carice Van Houten), la réalisatrice allemande des Dieux du stade (bien avant le calendrier donc !).
Enfin, on relèvera le jeu des acteurs qui arrivent à donner corps à leur personnages, mais également à la reconstitution historique ; Si bémol il y a, c’est peut-être dans les effets spéciaux qui veulent rendre la présence de la foule dans le stade et où l’on devine la construction par ordinateur. Il faut en particulier mettre en avant le jeu et les performances (d’acteur, mais aussi sportives !) de Stephan James dans le rôle-titre (il interprétait John Lewis dans Selma). Certes déjà sportif, il a reçu un coach intensif pour la course et ceci, à la façon d’Owens ! Il sera doublé dans quelques scènes par le champion canadien Hank Palmer qui joue dans le film le rôle de Quincy, le frère de Jesse (et qui a participé aux JO d’été de 2008 à Pékin).
Le réalisateur arrive à dépasser les apparences d’un film empli de bons sentiments, formaté selon les clichés des beaux biopics. En effet, il nous montre dans quelques scènes la ségrégation raciale toujours présente. Ainsi, dans les vestiaires où les athlètes blancs ont la priorité pour les douches ou encore à la fin du film, lors d’une réception en son honneur, Owens est obligé de passer par la porte de service et qu’il se plie à cette règle ! Mais ces scènes font pendant aussi à d’autres, en Allemagne, qui nous montrent la chasse aux Juifs, occultée pendant les Jeux (mais toujours présente !). C’est aussi l’ambiguïté d’Avery Brundage que Jermy Irons traduit bien et, par delà, la difficile décision de ne pas boycotter les JO de Berlin. Enfin, plus encore que le personnage d’Hitler (Adrian Zwicker) c’est celui de Goebbels qui marquera les esprits grâce à la composition inquiétante de l’acteur allemand Barnaby Metschurat (Tobias, dans L’auberge espagnole, mais plus connu dans le milieu des séries télévisées). Dernière ambiguïté bien rendue à l’écran, celle de la réalisatrice Leni Riefenstahl et de ses relations avec le pouvoir allemand, mais qui est aussi celle qui sera à la base de nouvelles façons de filmer le sport qui préfigurent les réalisations modernes. Pour conclure, aucune ambiguïté, là, dans le respect réciproque de Owens et du sportif allemand Luz Long, joué par David Kross qui avait incarné Michael Berg adolescent dans The Reader.
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